Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
philosophe établit, pour cela, la véritable Eglise, et fonde le royaume uY
J)ieu sur la terre. Quel est le but de cette Église? Comment obtiendra-
t-elle de l'humanité la pratique totale de la loi morale, la réalisation ob-
jective de l'idéal qui est au dedans de nous et sur lequel nous devons seul
modeler nos déterminations?
   Kant veut une réforme dans la société ; car, comme le dit son habile
interprète : «• c'est dans la société et par la société telle qu'elle est cons-
tituée, que la plupart des passions mauvaises se forment et s'alimentent. »
 C'est donc par une réorganisation, par une régénération que l'on doit com-
mencer pour extirper sûrement le principe du mal, je veux dire, pour le
rendre impuissant contre le principe du bien. Constituer une congrégation
d'hommes telle que chacun y rencontre des garanties sûres pour vaincre
le mal et pratiquer le bien, voilà, selon Kant, le grand moyen par lequel
on préviendrait la domination du mauvais principe, et préparerait le triomphe
de. la vertu sur la t e r r e . Si une pareille société pouvait exister, elle serait
une société divine, elle serait la véritable Église. Mais quel est le fonde-
ment, quels sont les éléments constitutifs d'une institution si parfaite ? c'est
la croyance morale pure. Cette croyance est écrite dans notre ca>ur; elle
est universelle : c'est assez dire que la véritable Kglise elle même possède
tous les caractères de l'universalité. Cette croyance morale n'a jamais été
parmi les hommes, l'objet d'un culte constant, je veux dire, d'une pratique
vraiment religieuse : elle s'est trouvée le plus souvent confondue a\ee je
ne sais quels autres dogmes, quelles autres conventions humaines dont la
source primitive échappe aux recherches. La distinction établie par Kant
entre la croyance historique ou ecclésiastique et la croyance religieuse pure,
est de la plus haute importance. Nous voudrions insister sur cette partie,
mais M . Bouillier a rempli si heureusement cette tache que nous ne saurions
l'entreprendre de nouveau. Qu'on lise la préface (pages X X V I , X X V I I )
et l'on recueillera sur ce point toutes les notions suffisantes. Kant arrive
à cette conclusion que « la règle suprême de l'interprétation de l'écriture
qui sert de fondement à la croyance historique, doit être la croyance pure. »
Toutes les religions ont deux croyances; la croyance historique ou ecclésiastique,
c'est-à-dire, celle qui s'autorise des traditions, des miracles, des saintes
écritures, et la croyance religieuse pure, celle qui émane de la conscience
et ne trompe jamais Le progrès moral, religieux et social, consiste dans
l'abandon des croyances historiques pour ne s'attacher qu'aux croyances
morales et religieuses pures qui constituent la religion rationnelle. Telle
est la doctrine de Kant. Ainsi la véritable religion consiste dans les croyances
morales pures qui à leur tour supposent la raison. Cette religion doit être
représentée par une institution, une et toujours identique à laquelle Kant
donne le nom de règne de Dieu, de véritable Kglise.—Cette théorie formulée,
on demandera des faits, on ouvrira l'Histoire. Mais Kant a prévenu cette
louahle curiosjté de vérifier, et de n'adopter jamais avant examen. Il a
présenté un tableau historique d'après lequel ou peut s'assurer de la lé-
gitimité de ses assertions. Avant l'avènement du christianisme, les croyances
ecclésiastiques dominaient ; la véritable religion n'était sentie que par quelques
hommes pieux, dévoués à l'Éternel, véritables patriarches qui offraient au
divin législateur tout ce que leur cœur renfermait d'amour et de vénération.
Les religions qui existaient étaient toutes polythéistes dans leur forme ; la
croyance religieuse pure à un seul souverain être était bien dans les esprits,
mais elle ne s'accommodait point avec les harmonies multiples de la nature»
Le christianisme ramena la croyance religieuse pure dans le culte, en décla-
rant que Dieu ne voulait point être l'objet d'un culte cérémonial, ni de for-