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259 Aux cheveux, aux yeux noirs ; Leurs mains formant des chaînes, Elles vont sous les frênes, Où de claires fontaines Leur servent de miroirs; Ni la flèche mogole, Ni l'air, ni la parole, Ni le ramier qui vole, Ne sont aussi légers Que leur course Mon Dieu! sur leur jeunesse, Que le plaisir caresse, Verse les jours d'ivresse Refusés à mon cœur! Presque toujours réunis au nombre de trenle, et souvent de quarante pour conduire un seul de leurs innombrables trou- peaux, les pâtres espagnols passent la belle saison dans les hauteurs et ne reparaissent dans la plaine que pour l'hivernage. A ce moment les chefsonl le soin de convenir de leur itinéraire et du jour de leur passage pour éviter de se rencontrer. Le costume de ces pelotons de pâtres est très original. Il se coin- pose d'un long morceau d'étoffe à fond uni, à quadrilles ou à ramages, qui se roule autour du corps et lient lieu de cape et de manteau à la plupart ; d'une veste courte collant sur le corps et d'une culotte en velours bleu, vert, ou amaranlhe. Ils sont coiffés du large feutre de la Navarre ou de l'Aragon, du mouchoir catalan noué en forme de résille, ou de celte résille elle-même importée de Séville ou de Valence. C'est parmi eux qu'on retrouve dans tout son caractère le type des belles figures espagnoles; ce leiutcoloré par le hâle, ce front saillant, cet œil vif, plein d'éclairs, encavé sous un épais sour- cil, et sur ces lèvres si purement dessinées celte expression d'orgueilleux dédain qui impose silence à tonte pensée légère quand on les voit fièrement se draper dans leur étoffe fanée ou leur manteau troué. Ils ont pour arme un couteau. Ce