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360 îais. Cette juridiction comprenait 133 paroisses ou parcelles. Ses attributions consistaient dans la connaissance de tous les faits concernant les tailles, les aides et les gabelles. Son éta- blissement remontait à l'année 1401. Elle avait pour officiers un président, un lieutenant civil et criminel, quatre conseillers et un procureur du roi. Nous avons eu l'avantage de connaître le dernier lieutenant civil et criminel, M. le président Maurice Duret de l'Etang. C'était un petit homme, fort drôle, portant bourse aux cheveux et chapeau rond relevé par devant. En descendant de son siège il prenait un panier au bras, et allait, en véri- table patriarche ou en disciple de Saint-Simon, si mieux aimez, faire sans façon les provisions de son ménage. C'était parfois assez plaisant de voir M. le président rentrant à son hôtel, son panier d'une main et de l'autre des œufs plein son chapeau, il voulait, à ce qu'il paraît, nous ramener aux mœurs antiques. Au reste, disait-il, n'est pas valet qui se sert, et sur ce il avait raison. Madame la présidente était l'opposé de M. son mari : elle était fière de sa noblesse, et, je le dis sans rire, fière de son titre de présidente, fière de sa beauté, car elle était belle, et pour une femme c'est bien quelque chose aussi. Toutes ces qualités, ou peut être la dernière seulement, faisaient qu'elle commandait en souveraine en plus d'un lieu, et qu'au lieu de recevoir la loi quelque part, elle l'imposait partout. Or, s'i est vrai de dire que se soumettre chez certaines femmes est chose difficile, chez elle c'était, je crois, chose impossible. Aussi ce tempérament faillit lui coûter la vie, et voici comment : Nous étions en 93 ; la Convention venait de rendre le décret du 21 septembre qui obligeait toutes les femmes indistincte- ment à porter la cocarde nationale. Aucune, sans risquer la prison, ne pouvait donc s'en exempter-, et la prison à celte époque fatale c'était, sauf quelques rares exceptions, une mort certaine. Madame de l'Etang sort de chez elle précédée