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« mais moi je ne serai plus; je ne vis qu'aujourd'hui, je n'ai
« pas vécu hier, demain je ne serai plus.
   « Que le regard du soleil, qui me réjouit encore, échauffe
« un jour d'autres fleurs, ce n'est pas là ce qui peut adoucir
« mon sort. Je suis condamnée à une nuit éternelle ! Oh !
« soleil, tu leur souris d'avance ; pourquoi te ris-tu de moi,
« du milieu de tes nuages, avec un froid dédain ?
   « Malheureuse que je suis ! quand ton doux rayon m'a
« éveillée j'ai mis en toi ma confiance, je me suis toujours
« tournée vers toi pour t'aimer. Et aujourd'hui tu m'enlèves
« la vie 1 Pour en soustraire le dernier reste à ta compassion
« orgueilleuse et inutile, je veux, par un dernier effort, me
« renfermer fièrement en moi-même, et chercher à t'échapper.
  « —Mais déjà tu as fait fondre en larmes les glaces de ma
« colère. Reçois donc ma vie qui s'enfuit, reçois la dans ton
« éternité. Oui, tu parviens même à délivrer mon ame de sa
« douleur. Mourante, je te rends grâces pour tous les biens
« que tu m'as accordés.
  « Tout un été, balancée par l'haleine fraîche du vent du
« matin, j'ai vu tourner autour de moi la danse des papillons,
« j'ai réjoui les yeux par mon éclat, les cœurs par mes par-
« fums. Toi qui m'as créée de parfum et d'éclat, je t'en rends
« grâces aujourd'hui.
  « Ornement du monde, quoique petite et modeste, j'ai
« fleuri, grâce à toi, dans les champs, comme les étoiles qui
« couvrent la prairie d'en haut. Mon dernier souffle ne sera
« pas un soupir ! Je veux encore une fois contempler le ciel
« et la beauté du monde. »
  « Soleil éternel de l'univers, viens me consumer et m'unir
« à toi ! Ciel fais briller ta tente azurée ; la beauté de mon
« calice est passée. 0 printemps, merci pour ton éclat ! Vent
« du matin, merci jpour ton souffle ! Je meurs sans chagrin
« comme sans espoir ! »