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248 11 ne se sent point d'inclination pour les Chartreux. Ce ré- gime sévère, ce silence, cette réclusion ne vont point du tout au bourgeois de Provins. Trop ont étroit et dure covine (manière de vivre) : Chacun fait par lui sa cuisine : Tous mangent seuls et seuls ils gisent— Je ne voudrais, ce m'est avis, Etre tout seul en paradis. Ce dernier trait de naïveté et de sentiment rappelle le bon Lafontaine. Mais le plus sérieux reproche que Guiot fait aux Chartreux, c'est la rigoureuse abstinence do chair qu'ils imposent même aux malades. Cette piété mai entendue révolte le bon sens du satirique: il rappelle que Jésus-Christ ordonna à ses disciples de manger sans scrupule tous les aliments qu'on leur présen- terait : il fait observer Que lait et beurres et fromage Assez (beaucoup) plus grand chaleur attrait (amène) A luxure, que chair ne fait. Prenez garde, Guiot; vous allez un peu loin: vous posez de hardies prémisses. Mais sur l'article de l'abstinence le moine de Cluny n'entend pas raison. Il peut dire avec le poète : Qui ne sait compà ùr auv maux qu'il a soufferts? En effet, sous cette robe noire qu'il a endossée depuis douze ans, Quel repos a-t-il eu le jour Fors (excepté) seulement au refretour (réfectoire) ? Là nous apportent hués pugnais (œufs gâtés), Et fèves à tout le gainbais (avec la cosse) ; Certes souvent en suis irié (irrite). Pour ce que le vin est mouillé, Me fait mal cœur après les Imés (œufs) : Que trop y a du boire aux. bues. (Parce qu'il tj a trop de la boisson aux bœufs, de l'eau). Cette lamentable peinture appelle un mouvement d'enthousiasme: Que béni soit saint Augustin ! De bons morceau-c et de bons vins