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52S nullités conventionnelles, si à ces démonstrations ne se joignaient le devoir pour le devoir, l'amour de Dieu pour l'amour de Dieu. Fais ton devoir, aime ton prochain comme toi-même pour l'amour de l'Eternel, ton Dieu. Cette morale sublime est néanmoins antérieure à l'Évangile ; ce qui le prouve, c'est que ces croyances existaient déjà : on les retrouve surtout dans le Peu- tateuque (T.évitiqnc X I X , i S . Deutéronome V I , 5). La croyance morale pure eut un règne magnifique dans les premiers temps de l'ère chrétienne ; mais à cette croyance religieuse s'adjoignit sensiblement une croyance historique : ce lut la un signe manifeste que le christianisme allait subir de dures épreuves, de terribles combats ; bientôt ce qui ne devait être que véhicule, devint essence, fondement, base générale, et la croyance historiqne parvint à do- miner de nouveau sans jamais pourtant atteindre à une autorité absolue. Les lulfes commencèrent ; les deux croyances se livrèrent des combats achar- nés cl tous les efforts tendirent à vaincre l'une ou l'autre croyance suivant les intérêts de tous ou d'un seul. Selon Kant, la croyance religieuse pure n'a jamais régné avec plus d'énergie qu'aux temps où il lui a été donné de vivre ( t ) . En un mol et avec cet illustre philosophe : « Distinguer la loi religieuse de la loi ecclésiastique ; reconnaître que la première est l'in- terprète suprême et le but unique de la seconde ; que tout ce qui est hisloiique et réglementaire n'est qu'un moyen d'éveiller et de vivifier le sentiment moral, c'est en cela que consistent les vraies lumières en fait de religion (a). » Mais où est la difficulté ? Elle est dans la subordination de la volonté à la loi morale, car la volonté hait la dépendance: la loi morale seule doit régler l'exercice de notre volonté, et la vraie religion n'existe qu'à ce prix. La véritable Église est l'institution qui amène les hommes à pra- tiquer cette religion, laquelle étant absolue, universelle, la véritable Eglise est universelle, la même pour tous : il faut donc proclamer la nécessité d'une telle institution, et souhaiter que le règne de Dieu vienne un jour, pur et universel sur la terre. C'est à cette Église que doit être confiée l'éducation du genre humain, c'est d'elle que nous attendons la régénération sociale, pour que tous concourent à la réalisation objective du plus su- blime idéal que l'on puisse concevoir. II. Les deux dernières parties de la théorie de Kant forment deux chapitres où la question du culte formulée avec une netteté et une concision r a r e s , rentre absolument dans le système rationaliste pur de l'auteur, et se trouve minutieusement d'accord avec les doctrines professées dans les chapitres pré- cédents. Ce que nous avons à dire sur cette partie se résume en ce seul jugement, à savoir, que le philosophe est toujours conséquent avec lui- même, et que, pour nous, qui partageons ses idées, nous en approuvons de même les conséquences pratiques. Voici comment Kant interprète ra- tionnellement les principaux mystères du christianisme. Le premier mystère que Kant nous explique est la Trinité. La Trinité n'est point un mystère, car tout mystère est un secret de la religion rationnelle, et la raison nous fait parfaitement entrevoir le sens de la Trinité. Dieu est à la fois « un législateur saint, un souverain plein de bonté, un juge intègre. ) Il nous > a crées, il nous conserve, il nous administre ; il nous envoie le vrai, le bien, le beau ; il est comme trois personnes dont chacune a pour mission ( 0 Voyez ta piéface, pag, Tyi, où cette prétention se trouve expliquée. {z) Kant. THÉORIE SUR I.A RELIGION, etc., pag. 85, tiafluct, (tu docteur Lot'tct,