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l'établissement d'une colonie, par une invasion, par des rela-
tions actives de commerce ou par d'autres faits bien établis.
Si ne pas faire de philologie sans l'histoire était un peu ti-
mide, en revanche faire de l'histoire avec la seule philologie
paraît un peu aventureux. Assurément l'élude des langues
peut quelquefois fournir des induclions qui, loin d'avoir be-
soin d'être confirmées par des faits déjà connus, portent avec
elles assez de certitude pour établir des faits ignorés. Mais la
pente est glissante; l'on passe facilement de la conjecture à
l'affirmation; l'œil trop longtempsfixésur une lueur finit par
y voir une clarté.
    De toute science on peut faire deux parts : d'abord celle
de tout le monde, restreinle à ce qu'il y a de mieux éprouvé
et de plus applicable. Grâce à la simplicité et au petit nom-
bre de ses notions, elle est d'un accès facile et, coûtant peu
d'efforts, n'est pas estimée plus qu'elle ne coûte. Mais elle
est pour nous un guide sûr, qui nous conduit à notre insu,
et il suffirait d'en élre privé un instant pour apprendre com-
bien il est indispensable. — L'autre, la partie transcendante,
n'appartient qu'aux savants; pour eux seuls est ouverte celte
carrière sans limite. C'est là que la vérité se dévoile, que la
lumière se fait; mais c'esl là aussi que se fabriquent les systè-
mes. Cette distinction est, dans la science étymologique,
mieux fondée qu'en nulle autre, parce que la ligne de sépara-
tion y est plus marquée.
    Qu'animé d'un ambitieux espoir on entreprenne de lire
l'origine des peuples dans les langues qu'ils parlent ou dans
celles qu'ils ont parlées et d'établir, par les rapports qui exis-
tent entre elles, leur parenté et leurs alliances, certes! le but
est noble, et il est besoin d'en avoir conçu toute la grandeur
pour oser, malgré l'incertitude des résultats, s'absorber dans
un pareil travail. 11 faut s'être résolu d'avance à ne reculer
devant l'élude d'aucun idiome, en fùl-on séparé par l'orga-