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Je rapporterai enfin ces quelques vers inédits d'un poète lyon- nais, qui tient à garder l'anonyme : Doux fleuves arrosant la cité de Ptancus, Apportent dans ses murs les trésors de Plutus : L'un, superbe, indompté, fuit bruyant et rapide, Comme de l'arc guerrier part la flèche homicide, L'autre, lent, incertain, caresse mollement Les rivages chéris qu'il regrette en partant, Mais du Rhône bientôt la course impétueuse Emporte au sein des mers la Saône paresseuse. Je termine ces citations des modernes par un passage du beau poème de notre illustre Cbateaubriand (1), lequel se rapporte à la Saône, et rappelle quelques traits de l'antiquité. Voici ce qu'il fait dire à Eudore, racontant son arrivée dans les Gaules : « Je remon- « tai l'Arar, rivière bordée de coteaux charmants; sa fuite est si " lente, que l'on ne saurait dire de quel côté coulent ses flots. Elle « tient son nom d'un jeune Gaulois qui s'y précipita de désespoir « après avoir perdu son frère (2). » On voit que le grand écrivain a rendu le passage de César sur la Saône. Quant au fait qu'il donne pour origine au nom de cette rivière, je vais y revenir bientôt, en rappelant quelques notions que l'antiquité nous fournit, sur les noms de nos deux fleuves. Pline nous donne une étymologie historique du nom du Rhône : il le fait dériver d'un endroit nommé Rhoda, lequel, dit-il, fut fondé par les Rhodiens, grands navigateurs, comme on sait, de même que la plupart des peuples qui habitaient les côtes ou les îles de l'Asie- Mineure. Il paraît que cette petite ville, oppidum, n'existait déjà plus lorsque Pline écrivait, mais qu'elle avait été située dans la Gaule Narbonnaise, près des Bouches-du-Rhône et des étangs qu'on y voit encore, sur la rive occidentale, à peu de distance à 'Agathael (1) Le grand écrivain a décidé une question longtemps disculée, à la ma- nière du philosophe qui marchait pour démontrer le mouvement, .le ne pense pas que personne aujourd'hui conteste le titre de poème à son admirable ouvrage. (2) Les Martyrs, livre V.