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164 plus souvent qu'un même monosyllabe, comme on le voit - actuellement encore chez les peuples de l'Asie orientale, fidè- les dépositaires des traditions des premiers dges. Bientôt cependant ces formules générales ont dû paraître insuffisantes. L'accroissement de la famille humaine multiplia les rapports et les besoins, l'esprit inventif modifia les objets malériels, et s'empara du domaine de la nature pour l'a- dapler à son usage. Dès-lors, le langage dut grandir avec l'homme. En suivant les règles de l'analogie, on commença à transporter les sons fondamentaux de l'individu à l'espèce, de la réalité à l'abstraction ; on isola les qualités de chaque chose pour les appliquer à diverses choses du môme genre ; on distingua l'action passagère de l'être permanent qui la pro- duit ; on suppléa par l'emploi de quelques mots connus à la répétition fastidieuse des mêmes noms ; enfin, on déter- mina l'échelle des nombres, les rapports de temps et de lieux, et toutes les circonstances accessoires. C'est ainsi que les par- ties logiques du discours, sans cesse présentes à la pensée hu- maine, lors même qu'elle ne les exprime pas, se dessinèrent clairement dans le langage sous les formes de substantifs, d'adjectifs, de verbes, de pronoms, de particules. Les rela- tions mutuelles des objets et les époques précises des actions diversifièrent bientôt ces divisions mêmes par la déclinaison et la conjugaison. Pour répondre à tant d'exigences, à tant de variations d'une même idée,, les mots purent d'abord être groupés entre eux en conservant leur valeur respective ; mais la continuelle rencontre des syllabes qui, dans la richesse croissante des idées, s'associaiunt et s'aggloméraient sans cesse d'après toutes les combinaisons de l'esprit, réduisit bientôt l'une ou l'autre d'entre elles au simple rôle de préfixe ou de désinence ; elles s'unirent en se modifiant, et leur union de- vint permanente : dès-lors un même mot contint plusieurs idées, le langage cessa de se traîner dans une voie devenue