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la moindre secousse, doivent rompre ce faisceau disparate. On se
demande avec anxiété ce qu'il adviendra quand disparaîtra de la terre
l'homme qui a réalisé prématurément et parla force brutale, cette
union générale des peuples réservée à l'action progressive de la rai-
son publiqueetde la civilisation. On tremble pour l'avenir de la France
contre laquelle tant de ressentiments, tant, de motifs de haine et de
vengeance auront été accumulés. On ne regrette plus alors que l'his-
toire séduisante écrite par M. Geoffroy soit seulement un roman : on
vient à penser que la réalité, malgré les cruels désastres et les amè-
res déceptions qui l'ont accompagnée, est préférable aux brillantes
hypothèses qu'on vient de lire ; car ces hypothèses qui étourdissent
sur le présent effrayent sur l'avenir, tandis que la réalité laisse au
moins l'espérance des temps meilleurs que feront inévitablement naî-
tre le bon sens et le patriotisme du pays.
   Ces réflexions ne sont pas un reproche indirect adressé à M.
 Geoffroy. Cet auteur a fait à la fois preuve d'intelligence et de ta-
 lent. F a voulu continuer l'histoirede Napoléon en nous le montrant
        I
 vainqueur au lieu de vaincu; il a dû construire son édifice sur les
 bases posées par les faits antérieurs, il a peint Napoléon tel que l'his-
toire nous l'a révélé.
   Depuis longtemps l'opinion publique a porté son jugement sur
l'empereur. Tout le monde aujourd'hui rend hommage au puissant
génie qui distingua ce grand homme, tout le monde vénère sa gloire
et son nom; mais si quelques-uns,entraînés par cet unanimité, vont
jusqu'à déifier Napoléon comme le type de la perfectibilité humaine,
un bien plus grand nombre, restant dans un rôle d'impartiale justice,
reconnaît qu'il ne fut pas exempt des faiblesses auxquelles est sou-
mise l'humanité.
   Si l'on examine avec une sérieuse attention les nombreux épisodes
de la brillante carrière de l'empereur, on voit prédominer dans tous
ses actes la conviction d'une supériorité universelle et !o désir iu-
satiable d'une despotique domination. Ces deux sentiments exclusifs
partent d'un seul est même principe que Napoléon, à son insu
peut-être, laissa germer et dominer dans son cœur. Ce principe,
c'est un égoïsme absolu. Cette vérité est pénible à dire ; mais elle
ressort évidente de la vie entière de l'empereur, soit que cette vie