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avaient combattu sous les aigles impériales, soutenaient encore que
l'empereur n'était pas mort, et que bientôt il viendrait, comme en
1815, chasser les infâmes qui foulaient aux pieds l'honneur et les
libertés de la nation.
   Cette erreur était excusable. Le peuple avait alors oublié les
ravages de la conscription ; il se rappelait seulement avec or-
gueil la gloire dont Napoléon avait entouré la France. Les exi-
gences du régime militaire lui semblaient moins pénibles à sup-
porter que les envahissements incessants et les vexations toujours
croissantes des aristocraties auxquelles les funestes événements de
1815 avaient ouvert un champ en apparence illimité. Mais cette
espérance qui persistait à invoquer le retour de Napoléon était
vaine, Napoléon n'était plus. Le brillant météore, dont la course
rapide avait un instant illuminé le monde, était allé s'éteindre au
milieu des mers. Le peuple ne pouvait plus revenir à son ancien
maître ; il n'avait, désormais, à compter que sur lui-même pour se
créer une destinée nouvelle et pour sortir de l'abjection où le vou-
laient plonger ces rois, revenus après vingt années d'exil sans
avoir rien oublié et sans avoir rien appris. Quand le moment fut
venu où la mesure des vexations et des abus eût été comblée, le
peuple comprit ce qu'il avait à faire. Trois jours lui suffirent pour se
délivrer des chaînes que, pendant quinze années, ses ennemis avaient
accumulé sur lui !
   C'est un problème dont Dieu seul peut connaître la solution, que
celui de savoir si les destinées de la France auraient été meilleures
dans le cas où Napoléon aurait continué le cours de ses conquêtes.
Pour apprécier avec quelqu'exactitude cette question délicate, il ne
faudrait pas seulement examiner les événements qui ont eu lieu, il
faudrait rechercher encore quels auraient été ces événements si
l'empereur avait continué ou reconquis sa domination. Ce travail
serait doublement difficile : d'une part, les faits sont bien récents
pour qu'on puisse les connaître dans toute leur vérité et les ap-
précier impartialement ; et, d'autre part, on risque bien de s'éga-
rer quand on s'engage dans la voie ténébreuse des suppositions. Ce-
pendant la comparaison de la réalité avec l'hypothèse pourrait
seule conduire à un résultat. Quelque jour, peut-être, une plume