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nous répugne aussi bien qu'à Strauss de voir la vie éternelle
uniquement dans l'avenir, dans un autre monde. La vie éter-
nelle doit commencer en nous déjà ici-bas. Mais il nous répu-
gne tout autant, il répugne, nous le croyons, à la nature hu-
maine de ne voir la vie éternelle que dans le présent. Malgré
les doutes que le fait mystérieux de la mort fait naître journel-
lement, il y a quelque chose en nous qui nous promet la con-
tinuation de cette vie dans l'avenir le plus lointain, et nous la
représente de plus en plus belle et resplendissant^. Nous
croyons que notre activité pour le beau, le vrai et le bien est
aussi éternelle que nos désirs sont vastes et profonds. Une car-
rière sans bornes est la seule qui puisse répondre à l'étendue
de nos vœux illimités !
   Or, voilà l'idée qui est contenue au tond de V Argument tèléo-
logique émis en faveur de l'immortalité, le seul dont nous
ayons évité de parler plus haut parmi ceux que Strauss a réfu-
tés, parce que c'est, à ce qu'il nous semble, le seul qu'il soit
impossible de détruire. Selon nous, la véritable forme de cet
argument est donc la suivante : « Nous tendons tous vers l'ab-
« solu ; néanmoins, comme êtres finis nous ne pouvons jamais
« nous identifier avec lui, donc il ne nous reste d'autre moyen
« que d'en approcher éternellement. » D'après les trois fa-
cultés fondamentales de l'homme, sentir, penser et vouloir,
on peut présenter ce même argument sous trois faces diffé-
rentes : a L'homme aspire à un bonheur infini, à une science
« infinie, à une sainteté infinie; donc il existe une immorta-
« lité dans laquelle, par un progrès sans fin, il approchera
« toujours de ce but désiré. » Mais quelle que soit la forme
qu'on choisisse, la force de l'argument est toujours la même,
parce qu'il repose toujours également sur une base psycholo-
gique. De toutes les manières on est forcé d'en reconnaître la
puissance, et d'en accepter la conséquence, à moins de vouloir
admettre, dans la partie la plus intime de la nature humaine,