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Et dans l'horrible espoir d'accaparer la terre,
Du commun héritage il a chassé son frère,
Ne lui laissant pour lot que les pleurs et la faim.


   Ainsi donc, à travers le grand désert des âges,
Aux trompeuses clartés du flambeau de ses sages,
La pauvre humanité sans appui, sans amour,
S'en va triste, nu-pieds comme une mendiante,
Tendant à chaque siècle une main suppliante,
Et la face tournée aux monts d'où vient le jour



   Mais en vain de sa plainte elle remplit l'espace,
Chaque siècle à son tour rive sa chaîne et passe ;
Seule, elle sent son cœur défaillir dans la nuit.
Oh! quel ange viendra lui révéler sa voie?
Qui lui dira le nom de celui qui l'envoie,
Et la plage lointaine où le temps la conduit?


   Ce but mystérieux que chaque époque rêve,
Hélas! moi-même aussi je l'ai cherché sans trêve.
J'ai rappelé le flot des jours évanouis,
Et laissant avec eux mon ame redescendre,
J'ai des siècles éteints fouillé la froide cendre,
Exhumant les pensers dans leur tombe enfouis.



   Et ne trouvant au fond qu'une vaine pâture,
J'ai cherché ce secret par toute la nature,
Et dans mon fol espoir j'ai couru sans repos,
Le demandant aux vents, aux fleuves, aux nuages,
Au silence des nuits, aux forêts, aux orages ;
Et ma voix a passé sans éveiller d'échos.