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514 d'un abri, il sait que dans l'eau on se noie, que dans le feu on se brûle, que telle saison de l'année succède à telle autre. /I n'y a pas d'homme qui n'ait de la sorte, en diverses limites, une certaine prévoyance des événements qui se reproduisent le plus fréquemment, et qu'il lui importe le plus de connaître. C'est ce commencement de science, résultat d'une observa- tion encore bien grossière et bien bornée, qui est le fonde- ment du sens commun empirique. Ce sens commun se com- pose donc, principalement, des notions primitives que chaque individu forme nécessairement sur lui-même et sur les êtres qui l'entourent, plus tard, il s'accroît, en outre, d'autres notions que l'individu reçoit toutes faites de la-société au milieu de laquelle il est placé. Parmi ces notions qui tombent dans le domaine du sens commun, il en est plusieurs qui, d'abord, ont été des conceptions et des découvertes d'esprits supérieurs, relativement à leur époque, puis, elles ont fait fortune par une cause ou par une autre, elles ont successive- ment pénétré dans les intelligences, elles sont sorties de la sphère intellectuelle des esprits supérieurs et des savants, pour entrer dans celle de la multitude, elles ont passé, pour ainsi dire, dans la circulation, elles sont devenues populaires. Cha- que siècle nous présente ainsi un plus ou moins grand nom- bre de notions, de découvertes scienlifiques qui sortent des livres des savants et de l'enceinte des universités, pour venir accroître le patrimoine intellectuel que le vulgaire d'une époque lègue au vulgaire d'une autre époque. Telle est l'o- rigine de ces prévisions, de ces conjectures plus ou moins justes de la multitude sur la marche des choses du monde physique et aussi sur la marche des choses du monde moral, telle est aussi l'origine de ces maximes populaires sur la con- duite de la vie, sur les divers mobiles qui, dans les diverses cir- constances, dirigent les hommes, sur les effets et les causes des passions, sur le gouvernement des affaires privées et aussi