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frir, son cœur généreux trouve encore une excuse pour la
cruauté dont elle fut victime.
   En lisant cet intéressant épisode, l'indignation et l'atten-
drissement agitent l'ame. On cherche à se remettre de ces
impressions pénibles en pensant que ce récit est une fiction,
ou, tout au moins, une exagération de la vérité. Celle pensée
serait consolante si elle était fondée ; malheureusement elle
ne l'est pas. Si l'on examine avec quelque attention ce qui se
passe dans nos grandes villes, on reconnaît avec douleur que
Eugène Sue n'a rien exagéré en traçant ce triste exemple de
la misérable vie de certains enfants. Londres et Paris recèlent
un grand nombre de ces infâmes industriels spéculant sur le
travail forcé qu'ils imposent à de pauvres enfants. Chants
dans les cafés, ramonage des cheminées, ventes sur la voie
publique de bouquets, de plumes métalliques, de fruits, de
menus articles de quincaillerie ou de mercerie, cirage de
bottes, commissions, mendicité même malgré les prohibitions
de la loi, tels sont, en général, les moyens pratiqués par ces
indignes exploiteurs de l'enfance, pour se créer des profils
quotidiens qu'ils emploient à satisfaire leurs ignobles passions,
Comme la Chouette à Fleur-de-Marie, ces misérables imposent
aux enfants qu'ils se sont soumis une tâche fixe et presque
toujours exagérée; et, lorsque cette tâche n'est pas com-
plètement remplie, les coups, la privation de nourriture et
quelquefois môme des souffrances provoquées par un raffine-
ment de cruauté, punissent le pauvre enfant de n'avoir pas
satisfait aux exigences de son maître .'
   Ces déplorables abus n'existent pas seulement à Londres et
à Paris ; ils se sont propagés dans les provinces, toutes les
grandes villes en sont affligées.
   Souvent, pendant les premiers jours de mars, alors que la
froide bise court en sifflant, et roule de gros nuages qui
versent de temps à autre un givre glacé, on voit, au coin de
quelqu'une de nos grandes places, un enfant grelottant de
froid, offrir aux passants les premières violettes qui soient