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 source qui reste aux écrivains médiocres, de ne rien respec-
ter, et d'offenser à la fois les mœurs, la religion et les
lois (1).
    J'ai déjà cité le manuscrit de notre bibliothèque ; il con-
tient des pièces sur Law, contrôleur général, sur Fontenelle,
Crébillon, etc. La réunion de ces pièces tient à l'histoire
d'une nation qui s'est toujours consolée de ses revers et de
ses perles par des plaisanteries et des couplets. Chamforl d é -
finissait spirituellement l'ancien régime : Une monarchie abso-
lue tempérée par des chansons.
    « INous avons eu de plus mauvais poètes que Gacon, nous
n'en avons pas eu de plus méprisés; son nom est devenu une
injure, et l'on ne peut disconvenir, en lisant ses épigrammes,
ses turlupinades, ses libelles, qu'il n'ait mérité le déshonneur
dont sa mémoire reste chargée. Ce n'est pas pour avoir com-
posé des satires, ce n'est pas même pour avoir trop souvent
fait de méchants vers que Gacon s'est déshonoré. Tous les
genres de satire ne sont pas blâmables, et il n'est pas donné
à tous les poètes d'y réussir; l'auteur qui s'exerce sans succès,
s'il respecte d'ailleurs les mœurs et la religion ne s'expose
guère qu'au désagrément d'être raillé par ceux qu'il voulait
rendre ridicules; mais, lorsqu'une basse méchanceté dirige la
plume du satirique, lorsqu'il attaque sans sujet et sans pudeur
les hommes les plus vertueux, les talents les plus distingués;
lorsqn'enfin il a l'air de spéculer pour vivre sur le scandale et
la calomnie, eût-il d'ailleurs un esprit supérieur, il ne peut
espérer d'échapper au juste mépris de ses concitoyens. De
quel opprobre ne se couvre-t-il pas, lorsqu'à la bassesse de
l'a me il a le malheur de joindre, comme Gacon, la grossièreté
de l'esprit? C'est en vain que l'abbé Trublet veut excuser les
torts de Gacon, en nous parlant de ses franchises et en nous le
représentant comme un homme qui avait moins de fiel que Boi-
leau. I! faul, ou que l'auteur de celle bizarre apologie n'ait pas


  (I) Magasin encyclopédique, VIe année, lomell, page 52.