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   Au milieu deces fêtes, plusieurs membres du Congrès qui avaient
assisté à l'inauguration de la statue de Gutenberg, ont été contristés
de voir son piédestal encore entouré de toiles d'emballage et d'une
barricade de planches.Et pourquoi, me demanderez-vous? Lejournal
de Francfort nous explique cette énigme. Voici le passage d'un ar-
ticle inséré il y a quelques jours : " Le statuaire David ue s'est-il
pas imaginé que Luther, le traducteur du Livre des livres, devait y
apparaître? L'archevêque s'en est offensé. On a traité, et il a été
convenu que Bossuet serait sur le même bas-relief. Tout paraissait
ainsi arrangé ; mais l'archevêque ne peut plus défendre la statue
contre les fanatiques ; une armée de soldats de Loyola, dont les
avant-postes sont à Strasbourg, à Spire, à Cologne, veut chasser
Luther de la place publique. »
   Y a-t-il rien de plus absurde ? des chrétiens s'offensent de voir la
figure de Luther sur un monument non religieux, mais historique,
et ils ne s'offensent pas d'y voir figurer l'empereur de la Chine, un
persan, l'empereur Mahmoud II et des Brahmes. Ces Messieurs de
l'Orient sont-ils donc meilleurs chrétiens que Luther. Si ce monu-
ment avait un caractère politique, les monarchistes pourraient aussi
s'offenser d'y voir figurer Franklin, Washington, Lafayette et Bo-
livar.
   Jusqu'à présent l'architecte et le comité ont résisté à ces folles
prétentions et ils ont raison, car ils sont responsables do l'exécution
du monument tel qu'il a été inauguré. Us en sont responsables envers
l'artiste donateur, envers les souscripteurs catholiques et protes-
tants, envers les députations de la France et de l'Etranger qui ont
assisté à la cérémonie. Mais, en attendant, une sentinelle doit veiller
à ce qu'on ne dégrade pas ce monument de notre célèbre artiste.
   Pendant que nous imprimons ces lignes, nous trouvons, dans un
journal allemand, le passage suivant d'une lettre de David au maire
de Strasbourg :
    « Je croyais connaître mon siècle, j'ai la douleur de voir que je
me suis trompé, que l'intolérance religieuse est encore vivante à
 Strasbourg, cette ville si distinguée par ses lumières, ses vertus et
 son patriotisme. Ma reconnaissance pour les Alsaciens doit faire taire
tout autre sentiment. Ils ont bien voulu accepter mon don; mon devoir