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 parole aulbaine..., Estuclions seulement d'accroistre et abonir
 la nostre, qui court aujourd'huy par toute l'Europe; trou-
 vons mois nouveaux, courts, doux, charnus, et nerveux, bien
 recherchez et eslabourez : faisons renaistre et resusciter ceux
 qui ont esté dès-piéça délaissés, rappellons-les; lesquels
 remis en usage, auront plus de grâce et de goust, pour estre
 sortis de nostre ancien estoc, que ceux que nous avons em-
pruntez des nations estrangères. Si d'adventure nous n'en
 avions pour exprimer ce que nous voulons traiter, ou re-
présenter, lors transplantons chez nous, adoptons et natu-
ralisons les estrangers les plus propres et mieux sonnants
 aux oreilles. L'usage et le temps qui apportent et emportent
beaucoup de mots vieux et nouveaux, les ferons vivre et revi-
 vre (1). » Et selon Henri Estienne : « Si le vieil françois estoit
bien espluché, on y Irouveroit grand nombre de manières de
parler, les quelles ont esté inconsidérément et à grand tort
bannies de nostre langage : et estans remises en leur entier,
lui feroyent pour le moins autant d'honneur, que luy font de
deshonneur un tas de nouveaux mots et façons de parler nou-
velles, qui, sans aucun adveu, sont entrées par les fenestres
aux bonnes maisons de France (2). » « Pourquoi, dit-il ail-
leurs, ne ferions fueillelcr nos romans, et desrouillcr force
beaux mots tant simples que composez, qui ont pris la rouille
pour avoir esté si longtemps hors d'usage.... mais il nous en
prend comme aux mauvais mesnagers qui, pour avoir plu-
stostfait, empruntent de leurs voisins ce qu'ilstrouveroyent
chez eux s'ils vouloyent prendre la peine de le chercher....
Combien de mots se sontinsinuez en la bonne grâce de nostre
langage par moyens subtils, sans que nous nous en soyons ap-


  (i) Nicolas Pasquier, livre VII, leltre I.
   (2) Henri Estienne : Traité de la Conformité du langage français avec le grec.
Livre J, obsei'v. 2.