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soo lecture suivie d'un de ces répertoires immenses ; et, parmi ceux qui auront mené à fin cette grande entreprise, com- bien auront su rapprocher, d'après leurs ressemblances et leurs affinités, des mois dispersés au caprice de l'ordre al- phabétique? Un dictionnaire n'est que trop souvent le tom- beau de connaissances précieuses. L'ordre alphabétique n'est bon que pour une recherche isolée, et tout ce qui est isolé est stérile. Il nous manque un Dictionnaire méthodique, ou classification des mots de la langue : une série de di- visions y présenterait réunis ceux qui ont une origine commune, qui ont subi des variations semblables, tous ceux entre lesquels l'esprit découvre un rapport quelconque. De chacun de ces tableaux ressortirait une des lois du langage, et l'intelligence s'en saisirait d'autant mieux qu'elle ne lui serait pas présentée d'une manière abstraite, de nombreux exemples la montrant, pour ainsi dire, agissante. L'Académie travaille maintenant à un dictionnaire his- torique de la langue française. Ce sera sans doute un bel ouvrage, mais toujours alphabétique. Bien plus volumineux que le dictionnaire actuel, il sera bieo plus impossible à lire. Il ne servira donc que pour des recherches isolées et aux savants seulement, car celui qui ne sait pas déjà beaucoup n'a rien à apprendre dans un dictionnaire al- phabétique. Pour être amené à l'ouvrir, il faut avoir un doute, et l'ignorant ne doute de rien, parce qu'il ne sait rien; pour chercher un mol plutôt qu'un autre, il faut avoir sur ce mot en particulier quelqu'obscurité à dissiper, et l'igno- rant a partout dans son esprit des ténèbres également épaisses. Un triage intelligent qui permette d'examiner à part cha- que délail du mécanisme de la parole est donc encore à faire. Une classification des mots qui les groupe d'après leurs rapports et les aspects multipliés de leur histoire, est indispensable à l'étude de la langue : c'est beaucoup que