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2 4'2 Molt y auroit des princes ars (bnîlt's). Onques (jamais) tant loyal feu ne fu Qu'ils {car ils) vaudroient mieux cuits que cru. Et que leur reproche-t-il ? leurs injustices? leurs mauvaises mÅ“urs? leurs guerres désastreuses? leurs exactions sur les pauvres serfs? Loin de là : il trouve que leurs cours ne sont pas assez brillantes, leurs dons pas assez généreux. Louis XII répondra plus tard, qu'il aime mieux voir ses courtisans rire de son avarice, que ses peuples pleurer de ses prodigalités. Aux yeux du moine parasite, l'économie est un crime irrémissible : de pareils princes no sont pas les fils de leurs prédécesseurs. Les véritables barons ce sont les barons où l'on dîne. Ceux dont il se plaint ont clé changés en nourrice, peut-être même auparavant, sauf l'hon- neur des dames que le courtois bénédictin ne voudrait pas offenser: Je ne voudrais être blâmé Des dames, sauve leur honneur. Ce n'est pas ainsi que vivaient les grands monarques des temps passés ! suit une longue énumération où se heurtent pèle-mêle Alexandre, Julius (César), Assuérus, qui tous tenaient splendi- dement leurs cours plénières, et Fcrri (Frédéric Barberoiisse), et le comte de Provence, et le comte de Toulouse, et cent autres encore. Cette seconde liste et fort longue; elle n'a pas moins de deux cents vers. Guiot est plus fort en biographie contem- poraine qu'en philosophie classique. Mais tout est tourné à enfance ; Et le siècle est anéanti. Aux yeux de notre poète, comme jadis à ceux de Nestor, les hommes dégénèrent : l'espèce humaine s'abâtardit du temps de Guiot, absolument comme du temps d'Homère. Il y a quelque chose de consolant à contempler une si longue décadence : on en vient à penser qu'au moins elle n'est pas fort rapide. D'ailleurs, comme on sait, elle s'est arrêtée de nos jours ; ou plutôt elle a fait volte-face. ÃNos bons aïeux avaient le cÅ“ur à gauche ; nous avons changé tout cela, il ne faut plus parler que de progrès.