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224 donne de l'unité aux oeuvres que nous serons tentés d'élever. Quelle sera cette idée? Quels seront ces principes ? En premier lieu, nous ne devons plus avoir de confiance dans aucun système exclusif. Vivant sous une forme de gou- vernement qui n'est le produit, ni d'un principe unique, ni de la volonté d'un homme ; qui ne représente, d'une manière exclusive, ni la monarchie pure, ni l'aristocratie, ni la démo- cratie, mais qui sait réunir dans une juste mesure, et concilier ces trois forces rivales dont Iristote et Montesquieu avaient indiqué l'antagonisme nécessaire, nous ne pouvons ni ne de- vons nous passionner, soit avec amour, soit avec haine, pour ou contre aucune des formes de gouvernement que les temps passés peuvent nous présenter ; pour ou contre aucun des grands faits que les siècles nous offrent. Nous ne devons donc jamais oublier que, pour la moralité, ['intelligeuce, l'étendue des idées, le XIXe siècle est nécessairement supérieur aux siècles qui l'ont précédé ; mais il ne faut pas que celte convic- tion nous entraîne à mépriser les siècles passés. N'oublions jamais que nous devons, aux efforts de nos pères, tout ce que nous sommes, tout ce que nous pouvons devenir ; rendons jus- lice à leurs travaux et montrons-nous reconnaissants de leurs efforts, lors môme qu'ils se sont trompés ; n'oublions pas qu'une des malheureuses conditions imposées à l'humanité, c'est que le progrès ne s'accomplit pas en ligne droite, et qu'un peu de bien ne s'acquiert pour les masses qu'au prix de maux individuels ; rappelons-nous souvent ce mot, trivial dans la forme, profond en lui-même, d'une des plus grandes intelli- gences du XVIe siècle : « L'esprit humain est un homme ivre « à cheval ; si on le redresse d'un côté, il tombe de l'autre. » Ne soyons donc ni surpris, ni effrayés de ces actions et de ces réactions terribles que l'histoire nous présente, entre les prin- cipes qui se sont disputé l'empire du monde ; rattachons toutes ces révolutions à l'idée du progrès qui s'accomplissait lente-