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 punition? Ne serait-il pas digne de l'homme de placer la
 piété, la grandeur d'âme au dessus de tout, même s'il était
convaincu que son ame n'est pas immortelle? N'est-ce pas
précisément ce qui constitue la vertu que de nous porter à
agir, nous ne dirons pas, sans égard à aucun bien, c'est im-
possible, mais sans égard à aucune récompense autre, que celle
que donne nécessairement l'exercice même de la vertu ? Ce
ne sont que les ignorants et les méchants qui croient que la
véritable liberté consiste à pouvoir s'abandonner à ses passions
et qui regardent la vie rationnelle et morale comme un escla-
vage pénible, l'obéissance aux lois divines comme un joug
pesant dont une rétribution future doit compenser les douleurs.
Aux yeux du sage il n'est aucun d'entre les hommes nobles
et vraiment grands qui ne soit déjà sur cette terre plus heu-
reux et plus digne d'envie que le plus puissant d'entre les
méchants. Si l'on a nommé quelquefois l'argument dont nous
parlons, argument moral, il est impossible de ne pas convenir
avec Strauss que cela fait penser à la fameuse étymologie de
« Lucus a non lucendo. » Ainsi, au lieu d'exciter les hom-
mes à la vertu par l'appât d'un gain futur, il faudrait plutôt
s'efforcer de leur faire comprendre que même s'il y a une vie
future, l'homme de bien doit vivre comme s'il n'y en avait
pas, c'est-à-dire chercher à aimer le bien pour des motifs
indépendants de cette croyance, afin que si celle-ci venait à
lui paraître douteuse, sa moralité ne périt pas avec elle. Ajou-
tons encore que selon la véritable philosophie religieuse, telle
que nous la concevons, l'homme le plus vertueux ne peut
faire valoir aucun mérite devant Dieu, et que le péché dont
aucun de nous n'est exempt ne peut mériter que la mort.
   Nous abandonnons à Strauss sans plus de peine aussi, la
preuve métaphysique : «L'ame est immatérielle et simple, donc
« elle ne peut se décomposer en partie, donc elle est im-
 « mortelle. » Il est vrai que nous ne croyons pas avec Strauss