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                     LYON APRÈS LE 9 THERMIDOR.                          703
    Dès le commencement de l'hiver, pendant que les représentants en
 mission faisaient emprisonner en foule les Patriotes, surtout les an-
 ciens membres des autorités, des rumeurs très-menaçantes furent
 propagées contre eux.Les registres des comités révolutionnaires furent
 dépouillés; et, sur ces indications, on répandit dans le public des
 tableaux de toutes les victimes de la Terreur, avec les noms de leurs
 dénonciateurs en regard. Qui avait pu livrer ainsi les secrets de la po-
 lice? quelle authenticité, d'ailleurs, avaient les listes qu'on faisait cir-
 culer ? Quoi qu'il en soit, elles furent adoptées avec avidité par la
 haine et le besoin de vengeance. La ville commença à se remplir de
 divisions, à retentir du bruit des querelles privées. On semait le bruit,
 on répétait, dans les proclamations des autorités, que les Terroristes
 tenaient des assemblées secrètes, qu'ils préparaient des soulèvements
 et des massacres, qu'ils se vantaient d'un prochain triomphe. Veut-on
 un exemple de l'absurdité des propos qui servaient de prétextes aux
 arrestations ? Voici l'accusation qui avait motivé celle d'un nommé
 Brochot : « qu'il avait dit qu'il était bien malheureux que Robespierre
fût mort; que, s'il eût vécu vingt-quatre heures de plus,les sept hui-
 tièmes des citoyens de Lyon auraient été hachés, même les chiens et
les chats, de peur qu'ils ne mordissent les personnes qui avaient fait
 périr leurs maîtres. »
    La mission de Charlier et de Pocholle, à Lyon, expira vers la fin du
 mois de brumaire. Ils furent remplacés par Tellier, accrédité dans les
 départements du Rhône, Loire, Saône-et-Loire, Ain et Isère. Les actes
de ce représentant sont presque uniquement relatifs à l'approvision-
nement de Lyon par des réquisitions de blé dans les départements cir-
convoisins. Richaud fut ensuite adjoint à Teiller. Pendant leur pro-
consulat, eut lieu la fête du 21 Janvier, anniversaire de la mort du
 Tyran. Elle fut célébrée avec une pompe tout à la fois atroce et ridi-
cule. Les hommes qui étaient alors les conducteurs de la Révolution
commençaient à sentir l'invasion du Royalisme sous la réaction qu'ils
avaient inaugurée; et, plus cette révolution dépérissait dans leurs
mains, plus ils affectaient de la déifier dans son acte le plus audacieux.
« Au milieu de la place de la Liberté [des Terreaux) , dit le pro-
gramme, un théâtre avait été élevé; il supportait un trône, où était
assis un simulacre de roi, couvert de la peau d'un tigre. Sur le devant,
la noblesse, sous l'emblème d'un loup dévorant, soutenait cette fi-
gure ; dans les griffes de l'animal, on lisait : Droits féodaux, cruauté,
oppression. A droite, on voyait le clergé, sous la figure d'un renard,
avec ces mots : Dixmes, hypocrisie ; à gauche, le fisc et les fermiers