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              CONCOURS DE L'ACADEMIE.



         ÉLOGE DE MADAME RÉCAMIER.




    L'Académie de Lyon vient de mettre au concours un sujet qui sort de la banalité
des programmes académiques. C'est un éloge pourtant ; mais c'est l'éloge d'une
femme qui n 'a été ni un auteur, ni un artiste ; qui a employé une intelligence dis-
tinguée, un cœur d'une rare élévation à rester femme, et par cela même a exercé
'a plus incontestable influence sur la société de notre temps. L'éloge de Madame
Récamier, c'est autour d'une figure rayonnante de pureté et de grâce la peinture du
monde le pl u s cultivé, le plus délicat du XIX e siècle ; c'est un tableau où, près
    une
         Béatrice immaculée, la grande image de Chateaubriand, la touchante et véné-
 rable physionomie de Ballanche auront pour cortège tout ce qui a tenu1 une plume
 *»ec dignité et distinction, tout ce qui s'est illustré dans les arts et dans la poli-
 tique, pendant les cinquante dernières années. Nous félicitons l'Académie de Lyon
    u n cn
           °'x pareil ; il est de nature à stimuler ces intelligences plus rares chaque
 jour, qui préfèrent des études intimes et de fines peintures au fracas des discussions
 humanitaires. Lyon, la ville natale de Madame Récamier, devait un hommage à la
 P'us gracieuse de ses illustrations contemporaines : l'initiative de cet hommage reve-
  nait de droit au corps littéraire, qui a vu figurer sur sa liste les noms de Chateau-
 D
   |'and et de Ballanche. La presse lyonnaise, absorbée par les événements politiques,
 n a donné, jusqu'ici, qu'une trop sèche mention à cette mort. La perte de Madame
 Récamier n'est pas seulement celle du modèle le plus accompli de la grâce, de la
 bonté et de l'esprit du monde, c'est la fin de toute une société, de tout un monde
 particulier, monde de haute culture intellectuelle, où se conservaient une politesse
 douce et bienveillante, une élégance de langage et de sentiments désormais abolis
 dans les mceurs françaises. Les concurrents pour l'éloge de cette femme, que la su-
 périorité de sa beauté et celle de son âme avaient fait le centre et le foyer de cette
 société d'élection, ont une tâche difficile, mais charmante. Les matériaux abondent
 pour cette oeuvre, et ces matériaux, c'est la vie, ce sont les écrits, les correspon-
 dances des personnages les plus illustres de l'époque ; c'est, pour ne parler que des
 morts, Chateaubriand, Mad. Staël, Benjamin Constant, Ballanche, Ampère, qu'il
 faudra visiter de nouveau dans tous les vestiges qu'ils nous ont laissés de leurs
  nobles vies.
    H est une chose, par-dessus tout, qu'il faut avoir connue pour bien peindre Ma-
 dame Récamier, et nous craignons que les livres, les récils, les correspondances
 '"édites soient impuissants à suppléer aux impressions qu'elle causait. Ce n'est pas