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110                    DES TENDANCES SOCIALISTES
    Mais ce que l'État ne peut pas faire encore pour la réalisation de
cette vague généralité, le droit au travail, s'il le peut, en partie, par la
protection intelligemment et populairement calculée qu'il accorde au
 travail industriel et agricole, pourquoi ne le ferait-il pas ?
    Si l'intérêt général s'en trouve bien, quel droit pourra se dire violé?
 Encore une fois, il n'y a pas de droit absolu en matière fiscale.
    Vous ne pouvez pas plus crier à l'iniquité, sociale, parce qu'on aura
protégé une industrie qui n'est pas la vôtre,que parce qu'on aura fait un
chemin de fer ailleurs que devant votre porte. Est-ce que les monta-
gnards des Alpes ou des Pyrénées ont le droit de s'insurger parce
qu'on aura fait, avec l'impôt, qu'ils paient aussi, des canaux et des
chemins de fer partout ailleurs que chez eux ? Où irait-on avec un
pareil système ? Chaque département voudrait avoir sa part dans toutes
 les dépenses, chaque canton, chaque commune, chaque contribuable ;
 — ou plutôt, chacun demanderait à ne pas payer l'impôt, et à
 garder son argent. — Ce serait tout simplement la dissolution de
l'État et de la société. Chacun s'administrerait, se garderait, se ferait
juger à sa guise. Ce serait le beau idéal de la liberté et du laissez-
faire.
    Reconnaissons donc que nul droit n'est violé parce que l'État aura
jugé utile à l'intérêt général, de protéger telle ou telle branche de l'in-
dustrie contre la concurrence étrangère.
    Mais cette protection est-elle, peut-elle jamais être utile à l'intérêt
général ?
    Vous dites non ;—je dis oui.
    Voyons nos preuves.
    La première que je produise c'est l'expérience. Vous conviendrez
qu'elle a sa valeur.
    L'Angleterre arrive peu à peu à la pratique du libre-échange. Mais
comment ses principales industries, les fers, la navigation, les houil-
lères mêmes, se sont-elles développées, ont-elles pris une supériorité
telle, qu'elles peuvent à présent braver toute concurrence ? — Par
une protection énergique et continuée pendant des siècles. L'Angleterre
adopte donc le libre-échange 1° quand elle n'a plus rien à craindre
des industries rivales ; 2° quand elle voit les autres nations s'organiser