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754 01! ALLONS-NOUS? les limites de l'autorité, (es droits et en même temps les devoirs des citoyens. ' Nous devons expliquer que nous n'entendons pas compromettre ici le principe chrétien de la déchéance, pourvu que du fait de la dé- chéance, on ne sépare pas celui de la réhabilitation. Peu importe,quant au résultat, que l'homme et les sociétés humaines soient perfectibles par leur nature première, ou seulement par une nature réparée. D'après une école de rationnalistes, l'homme est un être bon, per- verti par les mauvaises institutions sociales ; D'après une autre école de rationnalistes, l'homme est un être mé- chant, sociable seulement sous la loi de la force. Les chrétiens sont aussi divisés en deux écoles politiques ; l'une enseigne que la charité et la liberté, qui sont les deux lois du monde racheté, doivent progressivement passer dans la constitution politique des sociétés chrétiennes ; l'autre, au contraire, ne voyant que la peine sans considérer la rédemption, étend à toute l'espèce humaine cette dure sentence du poète païen : Humanurn paucis vivit genus. Le principe absolutiste, sous quelque couleur religieuse ou philoso- phique qu'il apparaisse, invoquant la foi ou la niant, est donc celui- ci : que les sociétés ne sont point des êtres collectifs, doués de raison et de volonté, mais qu'elles reçoivent la loi d'une autorité extérieure ; car ce principe nie que les masses sociales soient capables de conce- voir ce qui est bien, juste ou utile, et d'agir autrement que comme les instruments de certaines intelligences supérieures qui voient et veulent pour tous. Les facultés de l'homme étant donc, d'après ce principe, faussées ou perverties, il en résulte qu'elles sont le.plus souvent pour lui un don funeste dont l'usage le conduit à sa perte, et que toute la sagesse des gouvernements consiste à les enfermer dans d'étroites limites. De là , cette politique de séparation, afin que les hommes, sous les rap- ports de cité, restent isolés ; de là , cette règle qu'il n'y a de droits que ceux que l'autorité a reconnus, de vérités que celles que l'autorité à proclamées ; de là enfin, cet assujétissement à l'autorité matérielle non seulement pour les actes de la vie civile ou politique, mais encore pour ceux de la religion, afin que l'homme soit tout entier enveloppé dans son intelligence, dans sa volonté et dans sa conscience. Nous venons de poser les deux principes contraires. Mais, quoi donc? ignorons-nous que, dans la vie humaine, individuelle ou so- ciale, il n'y a rien d'absolu, que tout est mélange, transition, compro- mis, et que nous sommes sans cesse sur la route d'un état à un