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CHRONIQUE POLITIQUE. 681
liabules les plus secrets du gouvernement que nous consentirons à ne voir
dans le Courrier qu'un journal sans importance et livré tout entier aux
inspirations d'une politique personnelle.
11 est certain à nos yeux — et certes, si nous voulions, nous aussi,
nous mettre en frais de confidence, les preuves ne nous feraient pas
défaut,— il est certain, disons-nous, que le changement de M. Gémeau
a été une disgrâce ; cela était tellement avéré autour de lui que les per-
sonnes de son entourage ne disaient pas : le général va à Rome, mais
il est transporté à Rome. La première nouvelle en a été donnée de
Paris par une personne qui l'avait apprise dans le cabinet de M. Cartier
lui-même. Le général n'a été informé officiellement de son changement
que par le Moniteur et c'est en vain qu'il a espéré un instant faire re-
venir le gouvernement sur la détermination qu'il avait prise, sans dai-
gner même l'en avertir.
Mais en voilà assez sur le général ; aussi bien, nous ne sommes pas
ici ses avocats ; il est déjà oublié ; investi de pouvoirs extraordinaires, il
avait fini par se considérer comme un personnage indispensable, et
après les services qu'il avait rendus à l'ordre il se croyait candide-
ment au dessus des révolutions ministérielles ; ne recevait-il pas des
compliments autographes du président lui-même ? La tribune de l'As-
semblée législative n'avait-elle pas retenti de son éloge à plusieurs
reprises ? n'avait-il pas été un instant désigné comme successeur pos-
sible du général Changarnier ? Hélas ! il n'a même pas fallu un change-
ment de ministère pour lui apprendre que la reconnaissance n'est pas
la vertu ordinaire des gouvernements. Compromis aux yeux du parti
monarchique, comme aux yeux du parti républicain, sa carrière est
close, définitivement close. Le^discours qu'il a prononcé à Strasbourg,
après Février, ne lui sera pas plus pardonné que l'autocratie qu'il a
exercée parmi nous, sous le couvert de l'état de siège.
Il est d'autres magistrats que le parti de l'Ordre a pendant quelques
jours environnés et adulés et qui sont destinés à tomber comme le
général Gémeau ; nous prenons la liberté grande de signaler dès-à -
présent M. Réveil ; nous l'ajournons à deux ou trois mois ; déjÃ
des intrigues se nouent autour de lui et le nom de son successeur pro-
bable ou tout au moins souhaité par les plus ardents circule dans les
coulisses de la politique. M. Réveil est un nom nouveau ; quelles que
soient son incontestable habileté, sa probité, sa dextérité de conduite
au milieu des partis, son investiture est républicaine, c'est là son
crime. Ce nom, n'est ni une menace, ni un défi, ni une rancune;
à la rigueur, la République peut l'accepter, donc il doit être exclu et