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 524                      CHRONIQUE POLITIQUE.

     « Depuis quelques jours, les dames de notre ville vont admirer, dans
  les ateliers de Mme Treillard, rue Trois-Carreaux, n° 10, un corset que
 cette habile fabricante vient de confectionner pour Mra« la comtesse de
  Chambord. Sans parler de la coupe heureuse du corset et de sa forme
 ravissante, il est impossible d'imaginer une composition artistique plus
 correcte et d'un meilleur style : les anciennes armes de France et de
 gracieuses branches d'olivier et de lys brodées en or y relèvent le satin
 blanc qui sort d'une de nos meilleures fabriques. C'est vraiment une
 œuvre d'art, et quand il ne s'y rattacherait pas des souvenirs précieux,
 personne ne se plaindrait du dérangement occasionné par une visite
 chez cette dame.
     « Nous ne saurions donc trop engager nos aimables lectrices et
 même nos lecteurs à aller admirer ce petit chef-d'œuvre qui ne sera
 exposé que peu de jours. »
    Est-ce que la Gazette de Lyon n'a pas songé qu'un corset où se ratta-
 chaient des souvenirs précieux pouvait faire venir de coupables pensées,
 comme dit Molière ? Quel lecteur assidu de la Gazette a pu se rendre
 rue Trois-Carreaux n° 10, et contempler la coupe heureuse et la forme
 ravissante de ce corset, sans que l'envie lui soit venue de le couvrir de
 son mouchoir? Pour nous qui n'avons pas les mêmes scrupules, nous pro-
 posons d'ouvrir une souscription pour que ledit corset soit reproduit
par le pinceau et exposé au musée de Lyon. Cela ne peut manquer d'aider
au triomphe de la légitimité ; nous nous faisons fort de prouver aux
esprits les plus prudes que l'idée politique purifiera aisément ce qu'il
y a d'un peu hasardé dans le sujet du tableau, et pour peu que le pein-
tre ait du talent, il ne lui sera pas difficile de spirkualiser le corset en
question. Mais il ne faudra pas choisir cependant un peintre par trop
néo'-calholique, un de ces peintres qui tiennent le pied et le visage
pour chrétiens et tout ce qui les sépare pour païens. Car les souscrip-
teurs risqueraient de n'en pas avoir pour leur argent. Nous sommes
d'ailleurs dans un temps où tout projet de souscription est bien ac-
cueilli, il s'en est ouvert pour tout le monde, et, dans ce moment-ci,
M. Janmot achève, toujours par souscription, le portrait du général
Gémeau.