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DK PAKIS A LYON ET A AVIGNON. 497
dix compagnies s'abattirent sur la ligne de Paris à Lyon et à Avignon.
H en sortait de sous terre chaque jour. Les promesses d'actions, les
éventualités, les titres provisoires, les espérances, les probabilités
s'escomptaient à beaux deniers comptants. Le papier se vendait comme
de l'or. Les dix compagnies finirent par se fondre en une seule, et la
loi de 1845 leur accorda, à leurs risques et périls, la concession du
chemin de fer de Lyon, pour une durée de quarante-un ans. Une se-
conde compagnie obtint la ligne d'Avignon, avec le fardeau d'un em-
branchement sur Grenoble et une concession de quarante-quatre ans.
Le fonds social de la première Compagnie fut fixé à 200 millions ;
celui de l'entreprise d'Avignon à 150 millions. Le produit des deux
lignes devait s'élever, d'après les prévisions, à 20 millions, et la dé-
pense à 340,000 francs par kilomètre.
La charge de l'embranchement onéreux de Grenoble fit reculer la
compagnie Talabot. Elle préféra perdre un cautionnement de 10 mil-
lions, et se retirer devant l'accomplissement des travaux.
La Compagnie de la ligne de Paris à Lyon se mit bravement Ã
l'œuvre ; cette merveilleuse affaire devait produire des bénéfices mag-
nifiques. Aussi, les actions s'élevèrent-elles rapidement, et les ban-
quiers fondateurs écoulèrent sans bruit leurs titres, en réalisant d'é-
normes profits. Mais bientôt une sourde rumeur se répandit dans la
foule des actionnaires.
Les évaluations primitives de l'établissement de la ligne devaient
être considérablement dépassées. La panique gagna tous les porteurs
d'actions ; leur valeur subit une dépréciation rapide, que la disette
des céréales ne fit qu'augmenter. Les versements cessèrent, et bientôt
la Compagnie aux abois fut obligée d'implorer l'aide et l'assistance
du gouvernement.
La loi du 9 août 1847 lui accorda une prolongation de concession
qui pouvait être portée jusqu'à quatre-vingt-dix-neuf ans, en raison
de l'excédant des dépenses. La traversée de Lyon, évaluée à 24 mil-
lions, fut mise à la charge de l'Etat ; en outre, un prêt devait être de-
mandé, plus tard, aux Chambres, pour faciliter l'exécution des travaux
de la Compagnie.
Nous laissons passer sous silence les fluctuations de valeur, dans
le cours des actions, pendant les négociations, et les beaux coups de
filets que firent les initiés et les habiles ; mais, pour la moralité de la
gestion des compagnies, nous devons rappeler comment le Conseil
d'administration entendait le maniement de l'argent des actionnaires.
On avait fait des appels successifs et accumulé une masse énorme de