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DE GRENADE A MALAGA. (FRAGMENT D'UNE CORRESPONDANCE). A MON AMI FÉLIX M.....D. L'heure du départ avait sonné depuis longtemps, et, impatient, le manteau sur le bras, — c'est la manière la plus commode de porter cet incommode vêtement, —j'attendais encore sur le seuil de l'hôtel, et le corsario (1) qui devait me conduire de Grenade à Malaga, et le cheval qui devait me porter, et la caravane à laquelle je devais me joindre. Car, en Andalousie, les hommes ont toujours le temps, et nul peuple ne fait un usage aussi fréquent du futur en employant les verbes. On fera une autre fois tout ce qu'on a à faire, rien ne presse aujourd'hui ; on renvoie tout au lendemain, excepté la sieste et le dormir. — Ne vous impatientez pas, caballero, me disait un Espagnol en tordant sa cigarette dans ses doigts ; vous avez le temps. Si vous n'ar- rivez pas à Malaga demain, vous pourrez bien y arriver dans deux jours. C'était un de ces Espagnols pur-sang, qui se lèvent à dix heures du «latin pour aller au café prendre leur chocolat, et se retirent à midi Pour aller faire la sieste. Du moins, ce fut ainsi que je jugeai mon in- terlocuteur au premier abord. — Vous voyagez sans doute pour les affaires de votre commerce ? .ajouta-t-il. (r) Le corsario loue des chevaux et conduit les voyageurs d'un lieu à un autre. 27