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328 LES BÉGUINS.
e
la fin du XIII siècle, et fut condamnée plusieurs fois par les papes,
entr'autres'par Clément V, au concile général de Vienne.
Les Béguins de St-Jean-Bonnefonds ne semblent pas se rattacher
aux hérésiarques du même nom que le moyen-âge vit naître et mou-
rir, et dont, au XVIIe siècle, le quiétisme de Molinos refléta les doc-
trines.
Les nouveaux sectaires dériveraient plutôt du calvinisme. Ils ad-
mettent que les uns sont prédestinés à la vie céleste, et que les autres
sont repoussés par Dieu. La grâce peut retirer du gouffre, mais Dieu
seul la donne aux siens. On a cru pouvoir faire remonter ce petit
troupeau au Jansénisme et à Port-Royal ; leur croyance sur la grâce
pourrait, en effet, les en rapprocher. En outre, un des livres des Bé-
guins est un extrait de prières et de prophéties à l'usage des convul-
sionnâmes du cimetière de St-Médard, dont il ne reste guère qu'une
boutade de la verve railleuse des incrédules :
De par le roi, défense à Dieu
De faire miracle en ce lieu.
La séparation des Béguins d'avec l'église catholique est complète ;
ils n'en reconnaissent pas les prêtres ; ils ne se confessent qu'à Dieu ;
ils ont supprimé le chapelet, et ils déclarent eux-mêmes qu'ils sont
séparés de Rome, parce que le pape exigeait des droits qui ne de-
vaient être que des aumônes. Ils tirent leurs principales prières de la
Bible, font la cène, et chantent des cantiques en langue vulgaire.
La religion des Béguins serait donc plutôt un rameau détaché du
calvinisme ; mais la doctrine primitive du culte évangélique semble
étouffée sous des pratiques grossières et des croyances superstitieuses
qui annoncent une décadence morale et intellectuelle. Cependant, les
Béguins sont animés de sentiments très-fraternels vis-à -vis les uns
des autres ; ils s'aident mutuellement, et leur probité en affaires est
généralement reconnue.
Tout ce qu'on sait du passé de cette secte, dont il n'a pas été pos-
sible de suivre les diverses transformations, est sans intérêt, sans re-
lief, et échappe à la curiosité du plus patient compulseur d'infirmités
humaines. Que la secte des Béguins s'en console ! C'est toujours d'un
point obscur que sont parties les plus grandes destinées de l'hu-
manité.
On dit que cette nouvelle famille religieuse aurait pour père spiri-
tuel un prêtre, imbu de jansénisme, du nom de Drevet, qui, en 1791,
jetant le froc aux orties, abjura le célibat, et chercha, dans le mariage,