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238 I)li L'INSTITUTION DU JUGE. immense tout le sang et la sève que lui portent les mille et mille eanau* du corps populaire. La volonté nationale résume donc la souveraineté active et vivante d'un peuple ; elle se formule dans la loi, cette conscience publique qu' proclame humainement le juste et l'utile. Au-dessous de cette puissante vie, une et collective de la société, i y a la vie individuelle, la liberté du citoyen, qui viendraient se brise'' contre la masse sociale, et se heurter, dans un conflit incessant, contre les personnalités rivales, si la prudence politique n'avait créé une ém1' nente fonction de pacification. Ce pacificateur public est le pouvoir judiciaire, qui s'interpose comme un arbitre suprême entre la loi et la liberté individuelle. Le rouage judiciaire est donc une fonction neutre, passive, placée entre la souveraineté nationale et les souverainetés privées, pour eI1 régler le contact et en adoucir l'antagonisme. Si le juge est un arbitre entre la puissance nationale et le droit privei les deux parties doivent concourir à sa nomination. Chacun de ces il1" térôts est appelé à porter son représentant au tribunal qui doit vidflf le différend. Dans toute contestation, le débat est toujours entre la loi,ce symbole de la société, et l'activité individuelle, qui cherche soit à dominer la loi» soit à s'en emparer à son profit, contre un Intérêt opposé. Le juge qui ne serait qu'un agent direct du peuple, ou une créature du pouvoir exécutif, par son émanation, par son instabilité, ferait pes61' la balance du côté de son origine. Il serait partial ; il rendrait des sel-' vices ; il obéirait. Ce serait un appoint de force soit à la volonté natio" nale, soit aux volontés individuelles. La neutralité de la fonction d'équilibre disparaîtrait ; et, par un che- min, l'on irait jusqu'à rétouffement de la liberté individuelle, jusqu'à I3 tyrannie ; par l'autre, jusqu'à l'écrasement de la loi sous les souverai' netés privées, jusqu'à l'anarchie. La monarchie avait dit: Toute justice émane du roi. C'était un de ces dogmes auquel personne ne croyait, mais qui, dans la réalité du mouvement politique, se transformait en un pouvoir judiciaire à la dévotion dynastique, et dont l'inamovibilité, ce dernier refuge de l'iO" dépendance, tempérait à peine le zèle, la soumission, et quelquefois 1* servilité. Dans les crises révolutionnaires, la Constitution proclamait ce pfifl' cipe : Toute justice, émane du peuple. La maxime était vraie, en c?