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226                            CHRONIQUE MUSICALE.
ce mouvement, avec une majesté toute rossinienne. L'analogie delà situation »vCC
celle du premier chœur d'0(e/(o, a dignement inspiré M. Auber. Il y a là quinze
ou vingt mesures que nf'eut point désavouées le maestro immortel.
   La scène où Lorédan endormi rêve de son crime, et le dévoile involontairem*"1'
est une des belles pages de l'ouvrage. Cet air, Ah ! que Venise est belle ! jeté d'abor
avec la bruyante gaité de l'orgie, puis revenant presque le même, mais attristé p a
d'imperceptibles altérations au ton primitif, offre l'image fidi le du remords qui ""
se glisser au sein des plus étourdissants plaisirs. Belle pensée, que la musique ren
ici d'une façon si saisissante, qu'elle s'offre irrésistiblement à l'esprit de tous.
M. Dufrène l'a fort simplement et fort bien exprimée.
   M"* Lavoye est toute Haydéé. Ce rôle, qu'elle a créé, représente si ' bien, pour ' a
partie musicale, l'opéra entier, qu'un concert, où elle chanterait successivement c e
divers morceaux, n'attirerait pas, j'en suis sûr, une moindre aflluenCe que la pi eCe
elle-même. Tour-à-tour coquette, malicieuse, passionnée, elle paraît à la fois souS
les costumes, avec les caractères, et dans les styles vocaux qui lui conviennent >e
mieux. Aussi, cet opéra, dont elle fait le succès, ne cesse de lui rendre la pareil^'
Son air mimé : A Venise, sachez vous taire, est peut-être la seule réminiscence bien
franche du gracieux talent d'Auber que l'opéra contienne; elle le détaille et le chanle
avec une finesse si délicate, que, à son exemple, la salle lui envole chaque fois un
soui'ù'e et un discret murmure d'approbation, au lieu des grossiers claquements oe
main qui défloreraient ces paisibles jouissances de l'esprit.
  LR barcarole de la fêle au Lido plaît par un autre mérite, plus vif, plus piquant-
Fuis, au moment où l'amiral commence à sommeiller, ce motif animé fait place a
uqe suave et berceuse mélodie. M11^ Lavoye, bien secondée par M'I" P. Marchand*
a pour cette transition des accents d'une douceur pénétrante ; et je suis bien sûr q ue
Lorédan Jui-meme ne dort alors que d'une oreille.
   Les couplets : C'est la torvette, sont le triomphe de l'actrice. Toutes ses fioritu'eS
ne valent pas cette suave reprise : La brise arrive, où l'expression musicale trouve
dans son flexible gosier un interprèle aussi aérien, aussi vaporeux qu'elle. Tous re-
cevez réellement une impression rafraîchissante. N'en faites pas fi, recueille2''0
bien tout entière, car elle ne précède que de quelques instants l'infernal tapage f|"e
Malipieri va exécuter, sous prétexte de duo.
   Ce n'est pas d'aujourd'hui que nous nous sommes expliqué sur ce qu'on est coB'
venu d'appeler le jeu de notre aimable artiste ; les représentations d'Haydée n'o"
point modifié notre opinion. M u e Lavoye rappelle toujours, dans sa déclaroati0"'
ces masques de la scène antique, destinés à exagérer les effets dramatiques, afin "
les rendre sensibles à plusieurs milliers de spectateurs. Avec elle, un OKÎ a U'olS
syllabes pour le moins ; si elle dit merci, vous entendez toute une ritournelle. S6S