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                   CHRONIQUE MUSICALE.




    Haydêe n'a pas trompé les espérances que l'administration de nos théâtres aval1
fondées sur ses charmes. La foule s'est portée d'abord curieuse, et maintenant tou-
jours grossissante, à ses représentations, qui se succèdent au moins deux fois p a r
semaine. C'est l'événement de la saison ; c'est le talisman qui retient ou rappel'6
même les propriétaires, jusqu'aux chasseurs, loin des plaisirs à peine effleurés de la
 villégiature.
   La portée poétique du libretto n'est point ambitieuse. Un jeune dissipateur, dans
un moment de vertige, a proprement triché au jeu. Mais, le souvenir de son adver-
saire ruiné et mort de désespoir le poursuit sans relâche. Pour calmer ces remords,
que le fracas des armes et la gloire n'ont pu étouffer, il a adopté la nièce du mallie"'
reux, et se propose de l'épouser, par dévouement. Il veut partager ses biens entr'el'e
et le fils de sa victime. Or, ce jeune homme, épris de sa cousine, a su s'en faire «•'
mer ; il reparaît sous un faux nom, se distingue, s'élève aux plus hautes dignités, e t
se fait alors reconnaître. Et, quand notre infortuné, tourmenté par le souvenir de
ses torts, apprend qu'il peut les racheter en unissant les deux amants, il n'hésite
pas à rompre ses anciens projets, et à reprendre lui-même sa liberté.
   Haydée, jeune esclave grecque, est un rôle charmant en soi, mais évidemmen'
surajouté. Elle aime le héros. Placée là, en apparence, pour adoucir ses peines se'
crêtes, elle n'a réellement d'autre destination que de compléter les deux paires d'à
raoureux, dont les feux croisés animent l'intrigue, sans lesquelles jamais un opéra
n'atteindrait au troisième acte.
   L'infamie qui causa tant de malheurs était restée un mystère connu de celui seul
qui la commit. Mais, puisqu'il y a un secret, vous avez déjà pressenti qu'il est de-
viné. Vous pouvez même présumer que l'homme entre les mains duquel il tombe»
est un traître. Affirmez-le sans crainte, car il fallait bien un rôle de basse-taille!
   Avec ces divers éléments, M. Scribe a soufflé quelques-unes de ces bulles char-
mantes, qu'il sait si bien lancer, vides et creuses, mais reflétant à merveille toute*
les passions dont la musique s'alimente. Son dialogue remplit, dans toute leur ri-
gueur, les conditions que Diderot demandait aux poèmes d'opéra. Avec lui, " u
moins, le compositeur est à son aise, et « peut tourner et retourner les morceau*'