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200 DE L'INSTITUTION DU JUGE. Dans les temps religieux, la volonté du ciel révélée par les auspices et les oracles, est proclamée par le prêtre, tout à la fois devin, augure et juge. Dans l'Inde antique, le brahmane est le juge. Dans la Perse ancienne, Zoroastre confie le maintien de sa législation à la caste sacerdotale, et le mage, d'après le Zend avesta, est, tout à la fois, le prêtre, le savant et le juge. Il en était de même, en Egypte, où le prêtre présentait ce triple ca- ractère. « Hérodote a montré, dit Hééren (1), que la géométrie fut, dans ce « pays, la fille de l'agriculture, parce que les débordements du Nil né- « cessitaient le mesurage fréquent des champs. « Cet état, en agrandissant le cercle des connaissances mathémati- « ques de la caste sacerdotale, la rendait aussi l'arbitre naturel des « disputes qui devaient s'élever sur la possession des terres. » Le prêtre, chef du tribunal, portait une chaîne d'or, enrichie de pierres précieuses, au bas de laquelle était suspendue et gravée sur un beau saphir une figure aux yeux fermés. C'était l'image de la Vé- rité. Le président annonçait la décision du tribunal, en touchant, avec la figure de la Vérité, le plaideur victorieux. Chez les Germains, dans les assemblées populaires et à l'armée, aucune autorité judiciaire ne réprimait les désordres ouïes excès. C'é- taient les prêtres seuls qui avaient ce droit de police. Eux seuls avaient le privilège de frapper un homme libre, ou de le mettre aux fers. L'inspiration divine leur servait de prétexte. Velut imperante deo, dit Tacite (2). Les Gaulois avaient adopté, comme maxime religieuse, de sacrifier à leurs dieux, par les mains de leurs prêtres, ceux qui étaient pris en flagrant délit de crimes. Dans des sociétés diverses, séparées par des siècles, et dans des ré- gions opposées, le même phénomène social s'est présenté. Le prêtre et le juge se confondent dans la même personne. Au Pérou, la race des Incas, fils du Soleil, comprenait tout à la fois les chefs militaires, les prêtres et les juges. Toute infraction à la loi (i) Hééren : Politique et commerce des peuples de Vanliquite, traduit par Sukan. (a) Meyer, Institutions judiciaires.