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182 DE LA LÉGISLATION DE POLICE Mais le sujet présente des difficultés qui naissent de l'assiette même de la ville, de la forme des habitations, des travaux des habitants ; dif- licultés que ni les softis les plus vigilants des administrateurs, ni les habitudes de la plus exacte propreté de la part des citoyens ne pour- raient surmonter tout d'un coup. Ces difficultés sont nées depuis le jour où les Lyonnais, poussés par les nécessités de leur commerce, sont d*ccndus de leurs coteaux dans cette plaine triangulaire qui s'étend entre leurs deux rivières, le long du canal qui traversait de l'une à l'autre, où les navigateurs étrangers venaient amarrer leurs bar- ques. Ce champ de foire n'était primitivement fréquenté que dans la sèche saison, où il se couvrait de cabanes et de tentes. L'hiver, il était .abandonné aux brumes et au débordement des eaux. Mais peu-à -peu des habitations fixes et perpétuelles furent plantées au sein de ces boues. Elles se pressèrent, et, faisant des conquêtes sur le domaine des eaux et des marécages, elles constituèrent enfin la ville que nous connaissons. Elle eût mieux mérité le nom de Lutèce que celle qu'em- brasse la Seine, et, après tant de siècles, elle n'a pu encore vaincre les vices de sa position. Sans doute, elle marche à cette victoire, et, chose remarquable, depuis le commencement de ce siècle, à peine relevée des ruines de son siège, a travers tant de guerres, d'agitations et de luttes politiques et indivi- duelles, la ville de Lyon a fait plus de progrès pour son embellissement que pendant les deux derniers siècles de la monarchie arbitraire, tant il est vrai que la liberté, pour tes cités comme pour les états, est la source de toute prospérité dans l'ordre matériel aussi bien que dans l'ordre moral ! Mais on conçoit que ce progrès même nous l'ait mieux aper- cevoir celui qui n'est encore qu'au bout de nos espérances, et qu'il nous rend plus impatients dans les désirs que nous avons de l'attein- dre. On ne fait pas d'une vieille cité une ville neuve en quelques an- nées ; rien ne s'opère en semblable matière que successivement, à force de millions. Tracer théoriquement des plans pour percer nos vieux quar- tiers de larges issues, faire couler dans nos rues des eaux limpides et fraî- ches, et, en même temps, absorber leur fange dans des canaux sou- terrains, n'est pas le plus difficile ; nous avons des hommes de science qui font supérieurement tout cela sur le papier. Malheureusement, nous avons aussi un budjet mince, déjà miné par une dette qu'il faut se garder avant tout d'accroître. Nos conseillers municipaux le savent bien, et leur prudente persévérance montrera qu'avec des moyens peu étendus, mais bien dirigés, on peut encore marquer chaque année par une amélioration notable qui fasse un anneau entre celles du passe et celles de l'avenir.