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98 CHRONIQUE MUSICALE. gnaienl le plus de la voir ahorder ce nouveau genre, en montrant combien elle V est merveilleusement appropriée. Dans le Domino noir surtout, ses principaux triom- phes ont été l'Aragonaise et l'air: Ah ! quelle nuil ! Les couplets chantés près d'Horace endormi ont, au contraire, passé presque inaperçus, ainsi que la magnifique phrase dans l'église '.Heureux qui ne respire.... Que conclure de tout ceci? c'est que, pi- quante de caprice et d'agacerie, Angèle sent faiblement, et comme M lle Rachel, demeure incomplète ou tombe dans l'exagération lorsqu'elle veut exprimer ce qu'elle n'éprouve point ; c'est encore que, ravissante dès qu'elle chante, notre future Prima donna le sera doublement quand elle n'aura plus qu'à chanter. — Bettini nous est revenu, mais trop peu de temps pour nous, et, on peut le dire aussi, trop peu pour lui-même. En le voyant reprendre délibérément la monotone série de ses quatre rôles, puis s'enfuir aussitôt, on a crié : à l'écolier ! et, certes, les ap- parences justifiaient bien cette accusation. Eh quoi ! depuis six mois pas un effort pour franchir la limite fatale qu'on lui a tant reprochée ! Est-ce modeste défiance ? Est-ce inhabileté native? N'ose-t-il faire un seul pas hors des regards du pédagogue? et veut-il donc qu'on continue à dire qu'il promet beaucoup, jusqu'à l'âge où il ne pourra plus rien tenir? Nos regrets sont d'autant plus vifs à cet égard qu'on nous avait presque positivement annoncé la reprise avec lui d'Othello et des Huguenots. A part ces plaintes légitimes, le grand artiste n'aura pas trouvé à Lyon un accueil moins enthousiaste que lors de sa première apparition. Par la double épidémie qu' nous a affligés, de chants patriotiques et de ténors époumonnés, c'est vraiment pour l'oreille une résurrection que de pouvoir savourer à son aise cette voix d'or, pure> vibrante,généreuse,franche du joug des petites roueries du Conservatoire, filant le la jusqu'au souffle le plus imperceptible, et d'un grain si pur malgré son volume pro- digieux ! Comme timbre et qualité, Bettini laisse bien au-dessous de lui les noms les plus marquants qui nient illustré ce registre vocal. Sur la partie scabreuse de l'échelle du ténor, de mi en la, il se joue aussi libre d'efforts qu'une nourrice endormant son enfant ou que le matelot qui oublie la fatigue en répétant toute une journée ses trois notes favorites. — Ajoutez à ce précieux don celui d'une ampleur de respiration sans égale, et vous aurez l'explication de ces effets qui transportent toute la salle. Là où les maîtres,—et Duprez le premier, — anonnent une phrase, la hachent impitoya- blement, forcés de souffler avant et après leute note qui dépasse la portée, et sacri- fient vingt fois le sens musical aux nécessités d'une organisation insuffisante, celui qu'on a traité d'apprenti, sans préparation, sans emphase, aborde le trait le plus épi- neux, donne aux forte toute l'insistance, aux piano tout le moelleux désirable , et ter- mine sans qu'on ait en à se préoccuper de sa respiration plus qu'on ne s'inquiète de celle d'un orgue. Amateurs ou soi-disant tels ! vous que des stalles j'entends pour- suivre notre artiste de vos béotiennes 6pigrairim.es, qui vous entre-regardez avec une