Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
96                         LE DÉPART.

     Lorsque le vieux Eole, assis au bord des ondes,
     D'un souffle harmonieux enflant nos voiles blondes,
     Vers le rivage grec poussera le vaisseau,
     Sur cette mer, des Dieux le merveilleux berceau,
     A l'horizon voilé d'une légère brume,
     Je te verrai passer sur la brillante écume,
     Comme autrefois Vénus, guidant sur le flot pur
     Son char d'or attelé de colombes d'azur.
     Puis, loin de ce pays aux poétiques rêves,
     S'il m'est, un jour, donné de fouler d'autres grèves,
     Si je dois contempler le spectacle plus beau
     De la cité qui pleure aux portes d'un tombeau,
     Aux pieds des fleuves saints, chantés par les prophètes,
     Au pied des monts sacrés dont Dieu foula les faites,
     Je te verrai pareille aux vierges des déserts,
     Que le vieux roi David célèbre dans ses vers.
     C'est toi qui chasses l'ombre et qui fais la lumière ;
     Tu verses les parfums et la joie à la terre,
     Elle revêt, pour toi, ses plus riches couleurs,
     Et tes pas, sur le sol, font éclore des fleurs.
     Ainsi, quand le soleil, ce doux père du monde,
     Nous verse les rayons de sa chaleur féconde,
     Il se fait, sur la terre, un long tressaillement ;
     C'est l'épouse qu'embrase un baiser de l'amant ;
     Les plantes relevant leur tige langoureuse,
     Les oiseaux déliant leur langue harmonieuse,
     Et le ciel, et la mer, et les prés, et les bois,
     Tout sourit, tout s'anime et tout chante à la fois.

     Suis-moi dans mon exil, chère et douce figure,
     De ta grâce infinie anime la nature,
     Et que le monde entier sourie à mon souhait !
        T.a poésie est morte où le cœur est muet.
                                               C. REYNAUD.
           Mars 18 4 4.