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                   A L'USAGM DKS PARTIS POLITIQUES.                      763
ment le pouvoir que comme un instrument de guerre, et les vaincus
l'abhorrent comme un instrument d'oppression.
    Ce n'est pas à dire que rien n'ait été fait systématiquement et de
propos délibéré, dans ces derniers temps, pour rendre au pouvoir ses
véritables bases et le placer dans des conditions plus rationnelles de
 stabilité. Toutes nos révolutions avaient eu pour but l'initiation des
 citoyens à la vie politique, la participation plus active et plus directe
de la société à l'œuvre gouvernementale. Notre dernière Constitution
ne démentit point cette tendance. Elle voulut, en réglant les attribu-
 tions du pouvoir exécutif, restreindre l'action et par conséquent la
responsabilité de celui-ci. Elle voulut le garantir du vertige ou de
l'orgueil, et c'était, quoiqu'on en pense, de la sagesse. Mais, par une
inconséquence singulière ou par inexpérience politique, elle re-
 construisit d'une main et sans s'en apercevoir, ce qu'elle défaisait de
l'autre. Après avoir dit au pouvoir exécutif : Tu seras le magistrat res-
ponsable, chargé de faire exécuter mes lois, — elle l'invitait, pour
ainsi dire, à sortir de ce rôle secondaire, par l'éclat qu'elle donnait à
son origine. En faisant du Président l'œuvre du suffrage universel et
direct, elle lui donnait, sinon le droit au moins le prétexte, de tout
espérer, de tout vouloir, parce qu'elle lui permettait d'avoir la convic-
tion de tout représenter. Lorsque les lois lui prescrivaient ses devoirs
et lui traçaient une destinée calme et modeste, il semble qu'une mau-
vaise fée, cachée dans l'urne du suffrage, vient lui jeter un sort le jour
de sa naissance et lui dire : Tu seras ambitieux.
    La Constitution des Etats-Unis n'a pas commis cette faute. Là le
gouvernement ne devant être la chose de personne, res nullius, le
pouvoir exécutif n'a point une origine aussi glorieuse. Il suffit que sa
naissance ne lui impose ni la servilité devant une majorité parlemen-
taire, ni l'ambition de lutter contre elle et de prendre sa place. Les formes
de l'élection présidentielle consacrent, seulement l'indépendance du
Président, parce que son indépendance est la condition de son impar-
tialité. Quant à nous, moins sages, quand il s'est agi de la création
d'un pouvoir exécutif que nous désirions limité et impartial, nous
avons voulu que tous les dieux, c'est-à-dire le peuple, présidassent
en personne à sa naissance. La montagne a enfanté une souris, ne
soyons point étonnés si quelquefois la souris se prend pour le lion.

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