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674              DISCUSSION SUR LA LIBRE EXPORTATION
 valent. Vous vendez vos tissus en conséquence de leur supériorité,
 pourquoi nous qui contribuons à cette supériorité n'en partageons
 nous pas les bénéfices ?
    Prenez garde, vous n'améliorerez pas votre condition de vendeur en
 obtenant la franchise à la sortie. Vous subirez toujours sur le marché
 étranger la concurrence des soies du Piémont. — Que nous importe?
 puisque nous la subissons déjà sur le marché national?
    Il y a et il y aura toujours des obstacles insurmontables à votre
exportation. Les Anglais n'ont pas l'emploi des qualités que vous pro-
duisez. Après les avoir achetées en 1848, ils ont été obligés de les ra-
mener à Lyon, parce que c'était là seulement qu'on pouvait les mettre
en œuvre. —Tant mieux pour vous. Mais s'il en est ainsi pourquoi
craignez-vous qu'elles retournent en Angleterre?
   Le Piémont, comme la France (c'est là un des principaux arguments
des protectionnistes) impose un droit de 2 francs par kil. à l'exportation
des soies. Nous enrichirons donc le Piémont en lui payant 2 fr. pour
chaque kil. que nous serons obligés de lui acheter pour remplacer les
soies françaises. — C'est possible, mais aimez-vous mieux que les
producteurs français vous les paient à vous-mêmes? (1) D'ailleurs vous
enrichissez déjà le Piémont par le prix de toute la soie que vous ache-
tez. Et puis, en taxant les soies françaises à leur sortie, et, par consé-
quent, en les renchérissant sur les marchés étrangers, ne donnez-
vous pas indirectement, mais réellement, une prime à la soie pié—
montaise dont vous faites hausser le prix?
   Tels sont, sinon quant à la forme du moins quant au fond, les
sophismes et les réfutations qui se sont rencontrés dans ce dialogue
de la protection et de la liberté. Nous regrettons vivement qu'un des
plus honorables industriels de notre cité, délégué au conseil général
des manufactures, ait cru devoir apporter le contingent de ses lumiè-
res et le concours de son zèle et de son influence à la cause du sys-
tème protecteur. Ce n'était pas à l'organe de l'industrie lyonnaise
qu'il appartenait de prendre ce rôle. La Chambre de Commerce de
notre ville avait, par des travaux trop remarquables, mis toutes ces
questions en lumière, pour qu'il fut possible de se méprendre sur la
conduite à tenir. Elle avait toujours détendu la liberté et avait su
placer les intérêts de notre vaste industrie sur un terrain plus élevé,

   (i) M. Pagezy, de Montpellier, évalue à quatre ou cinq millions par année la
prime payée par les producteurs de soies aux fabricants d'étoffes, grâce au droit de
sortie. Ce chiffre ne nous paraît vrai que pour une partie.