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596 LIEUX COMMUNS mais que Pieu me garde contre mes amis ! Cette idée ressemble à un paradoxe : il y a cependant longtemps que nous disons en France : On ne s'appuie que sur ce qui résiste. Et quel est donc le pouvoir pour lequel la nation n'ait été prise d'une tendresse pleine d'ardeur et de servilité? Y en a-t-il un qui puisse se plaindre d'avoir été traité en étranger par cette France aux moen^ faciles et prodigue d'embrassements ? L'obéissance n'a point recule devant les décrets de la Convention. La nafion s'est aplatie sous les pieds de l'empereur, comme l'aire où l'on bat le blé. Louis XVHI, a son retour, excita des transports, et la France avait presque des larmes dans la voix, en disant, comme M. Pardessus sortant de l'au- dience royale : « Mon roi m'a pardonné. » Quant à Louis-PhilipPe> a-t-il rencontré des ministres indociles, le corps électoral lui a-t-» envoyé des députés ombrageux et d'une conscience tropincorrup- tible, et ces députés ont-ils refusé à sa politique le concours de leur infatigable dévouement ? Ce qui a peut-être le plus nui, dans l'opinion du parti conservateur, à Louis-Philippe et à sa famille, ce qui a le plus promptement efface son souvenir dans la mémoire de ses amis les plus chauds et de ses admirateurs les plus endurcis, ce n'est pas sa résistance au progrès libéral de la France, ce ne sont pas les fautes de son administration, ni l'avilissement des pratiques gouvernementales , ce sont bien plutôt les scrupules et les hésitations qui ont paralysé, à la dernière heure, les moyens de répression. Sa vieillesse et son impuissance lui ont fait plus d'ennemis, que toute la politique de son règne. Sans remonter aussi loin, il nous a été donné de voir la France, se préoccupant bien plus, depuis le 24 Février, de la conservation et de l'aggrandissement de l'autorité que du maintien des libertés anté- rieures. Toutes les écoles socialistes se précipitaient vers le Pouvoir, pour lui demander un abri contre la misère ; toute la bourgeoisie se jetait dans les bras de la dictature , pour se défendre contre Ie Socialisme. Et à peine le pays eut-il désigné légalement le Président de la République, que chacun fut sur le point de s'écrier, comme après Marengo : Voilà l'empereur ! Agenouillée sur le rivage, la France sa- luait déjà le soleil de l'Empire s'élevant au-dessus des vagues révolu- tionnaires. Certes, si Louis-Napoléon reste fidèle à ses serments, s'il quitte le Pouvoir avec autant de loyauté que le général Cavaignac de qui il l'a reçu, si, en un mot, il agit en honnête homme, nous con- naissons beaucoup de ses électeurs qui lui reprocheront d'avoir abuse de leur candeur et de les avoir pris pour dupes.