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4M                               CHRONIQUE LOCALE.
jour» et meurent ensuite, pour renaître le mois suivant. Ils ont une raison secrète,
 un motif caché. On a beau les nier, les démentir, ce vieux proverbe : il n'y a pa>
 de feu sans fumde est surtout vrai en politique ; soyez-en sûr. Or, qu'arrivera-t-il,
le jour où l'état de siège sera ainsi brusquement levé, en même temps que le système
politique sera modifié ; il arrivera que le déchaînement de ce que vous craignez le
plus, de la presse sera plus véhément et que la propagande redoutée par vous sera plus
active, en même temps que l'autorité sera plus timide et plus hésitante à réprimer. »
   Ce passage subit de la compression à la liberté aura pour premier effet d'accroî-
tre l'audace des partis. Ils useront de la liberté comme d'une victoire ou d'une re-
vanche, et comme dans les hautes régions officielles, le système politique nouveau
ne sera pas complètement déterminé, le bras de la justice ordinaire vacillera. Enlevant
l'état de siège aujourd'hui, la transition sera régulière, l'action des lois facile, et, à
supposer que certaines gens, l'état de siège étant levé aujourd'uui, en conservent quel-
ques appréhensions, on peut leur affirmer que ces appréhensions leur épargneront
de plus grandes terreurs dans l'avenir.
   Nous raisonnons ici au point de vue des gens qui, sacrifiant tout au présent, n'ont
que des bénédictions pour l'elat de siège , au point de vue de leur seul intérêt ;
nous n'invoquons ni le droit, ni la Constitution, ni la raison, ni la justice politique.
Tout cela a été, d'un commun accord, voilé par les partis. Tel ardent libéral qui,
avant Février, aurait crié à la tyrannie pour une chiquenaude donnée à son voisin,
prend plaisir à lui voir administrer la bastonnade; le principe d'autorité a tant besoin
d'être fortifié et réhabilité !
    Ainsi, le général Gémeau a fait fermer, dans le courant de ce mois, une vingtaine
de .cafés, tant à Lyon que dans la banlieue. Qui s'en est ému? Personne. Un café qui
se ferme sans que son propriétaire soit traduit en justice, sans qu'on prenne le soin
de lui en dire la raiion, quoi de plus simple ! Vaul-il donc la peine de s'en inquiéter?
l'état de siège n'a-t-il pas les pouvoirs les plus étendus ? n'est-il pas irresponsable? Eu
vérité, la conscience publique s'altère ! Ce n'est, pas que nous trouvions exorbitant
que l'autorité ferme un établissement, s'il s'y commet des délits ; ce que nous trouvons
exorbitant, c'est qu'il n'y ait ni jugement qui constate un délit, ni condamnation qui
punisse le coupable, s'il y en a. On aura beau dire, ce n'est pas là de l'ordre, c'est
la négation même de la civilisation.
   Il serait digne du général Gémeau de faire comprendre au Gouvernement qu'il
est temps de rentrer dans les voies légales ; mais, à parler franchement, nous avons
peu d'espoir d'être écouté ; il paraît même que, dans une de ses dernières visites au
Cercle du Commerce, le général a ouvertement déclaré que l'ère des rigueurs salutaires
ne faisait que commencer et que le Gouvernement en était à se repentir de sa clé-
mence, de sa modération. Qu'est-ce donc que l'état de siège nous réserve? Tous les