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                        CHRONIQUE MUNICIPALE.                         419
 chose si désirable. Ce que d'autres avaient fait précédemment, le Co-
mité de 1848 l'a accompli comme conséquence naturelle et inévitable,
selon lui, des nouveaux principes au nom desquels il agissait.
    Mais il ne songe pas au peu de stabilité des œuvres humaines. En
effet, à peine le Conseil municipal, nouvellement élu, est-il installé,
qu'une Commission est nommée pour exanimer la question et ré-
pondre aux diverses réclamations qu'elle avait soulevées.
    Le rapport de cette Commission, lu et approuvé dans la séance du
23 novembre 1849, est conçu dans un esprit de conciliation, de fer-
 meté et d'indépendance auquel on ne saurait trop applaudir. Il ren-
ferme de nobles paroles, d'utiles enseignements, et surtout une cri-
tique impartiale et juste, à l'endroit de cette prodigalité dont on a abusé
pour décerner les honneurs de la place publique « à des familles
 « princières, à des grands seigneurs, à des hommes encore au pou-
« voir , sans songer qu'un jour on demanderait à ces noms quels
« étaient leurs titres et leurs mérites. »
    Rayer, une fois pour toutes, les noms politiques, anciens et nou-
veaux, était le désir de la Commission, qui a regretté ne pouvoir le
faire, à cause de la confusion que cela occasionnerait. Ce regret, nous
devons le partager, car il importe de rompre enfin avec le passé.
   La Commission a reculé devant une difficulté d'exécution ; elle a
craint de jeter la confusion dans les relations d'affaires. Ce motif,
quelque louable qu'il soit, aurait dû céder devant la nécessité de créer
quelque chose de durable, pour ne pas exposer les générations futures
à toutes ces brusques variations, à tous ces changements qui se font
sentir chaque fois qu'un orage politique éclate sur le pays. Il fallait,
pour satisfaire à tous les intérêts, et prévenir cette confusion dont on
se plaint à juste titre, donner à nos rues, quais et places des noms
qui ne pussent alarmer aucune susceptibilité, susciter aucune agita-
tion, enfin des noms sans signification politique. On pouvait, ce nous
semble, adopter des dénominations qui se rapportassent ou aux lo-
calités, ou à des villes, ou à des célébrités littéraires ou scientifiques.
Un exemple prouvera, mieux que toutes les démonstrations, l'infailli-
bilité de ce moyen. Voyez le quai d'Occident, la rue Centrale, le quai
de l'Arsenal, le quai de la Charité, le pont de la Guillotière, a-t-on
jamais songé et songera-t-on jamais, sous prétexte de révolution, à
leur enlever leurs appellations ? Evidemment non, parce que ces ap-
pellations répondent à des besoins, sont consacrées par le temps, et
 ne renferment rien qui soit de nature à provoquer contr'elles l'ostra-
 cisme dont les partis vainqueurs sont toujours prêts à faire usage.