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370                        I..V CONSTITUTION.

chose arriverait/dans les éléments de cette majorité rouge ; ils se fe-
raient aussi contrepoids les uns aux autres, et, s'il arrivait que quel-
que chose de trop exorbitant fût tenté, la portion la plus modérée, et
il y en a toujours une dans toute assemblée, se rejetant du côté de
la minorité, ferait aussitôt un déplacement de pouvoir. Ah! certes,
nous ne disons pas que l'avènement d'une majorité rouge ne serait
pas un mal, mais nous soutenons que la perturbation qui résul-
terait d'un renversement de la Constitution serait bien autrement
grave et bien autrement irréparable.
   Eh bien ! ce que nous disons là nous croyons que tous les hommes
sensés le pensent aussi. On peut se laisser emporter à des affections
politiques blessées, parler le langage de son parti, se montrer de
mauvaise humeur contre la République et la Constitution, mais, en dé-
finitif, avant d'en venir à jeter un tel brandon d'incendie, on réfléchit
aux conséquences. C'est un rôle qu'on laisse aux casse-cou des
partis et aux ambitions subalternes qui se groupent derrière les prin-
cipaux personnages, rôle purement de bavardage et de déclamation.
Quant à l'action, à l'action véritable, elle appartient aux hommes sé-
rieux, qui savent combien il y a à hésiter avant de donner le signal
de la guerre civile et avant de provoquer un nouvel essor de la Révo-
lution, en croyant provoquer une contre-révolution.
   La Constitution a bien plus de racines qu'on se l'imagine, car elle a
la puissance d'une chose nécessaire ; elle est le seul terrain où puissent
se consolider l'ordre et la paix. Au fond, tous le sentent, même ceux
qui ne l'aiment pas. Voilà pourquoi bien des gens crient contre elle,
qui cependant ne voudraient pas, en l'anéantissant, ouvrir un horizon
si sombre à l'inconnu. Chacun voit bien l'héritage, mais qui nom-
mera l'héritier ? Quelle ne serait donc pas la responsabilité du parti
ou de l'homme qui oserait commettre un attentat dont la portée se-
rait si incalculable ? Quelles vengeances n'assumerait-il pas ? Et puis,
qui donc, en France, peut se flatter d'apporter tout de suite assez de
bonheur et de gloire pour fermer la blessure saignante et se faire
absoudre? Non, non, à nul parti, à nul homme n'appartient l'immense
force qu'il faudrait pour se présenter après avoir tué la souveraineté
du peuple et dire ; Me voilà. Le coupable aurait bien soulevé des tem-
pêtes, mais il s'abîmerait le premier dans leur sein, à tel point qu'on
peut hardiment faire cette prophétie : celui qui assassinera la Cons-
titution, ne sera pas celui qui en recueillera l'héritage.
  Telles sont les raisons qui nous font comprendre pourquoi la