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80                            DE L'ORDRE.

    Repousser toutes les coteries, tous les partis, toutes les ambitions
qui menacent la souveraineté populaire dont la forme républicaine est
l'expression ;
    Gouverner la République avec des hommes sincèrement attachés à
la République ;
    Chercher les alliances dont toute nation a besoin au-dehors d'elle-
même, dans la communauté des principes et des intérêts politiques.
    C'est une grande erreur de croire que l'ordre soit inconciliable avec
la République. La démocratie constituée enfante, au contraire, l'auto-
rité la plus forte qu'on puisse supposer dans un gouvernement, mais
en même temps l'autorité la plus progressive, la plus conforme à la
raison. Savez-vous où réside l'anarchie? Momentanément, dans la ré-
volution, parce que la révolution étant un passage de la servitude à la
liberté, a les inconvénients de l'une, et ne fait que promettre les fruits
de l'autre ; mais encore plus dans la contre-révolution, qui est un
autre passage vers le despotisme, et enfin dans le despotisme lui-
même, monarchique ou aristocratique, surtout chez une nation trop
intelligente et trop raisonneuse pour que la compression des idées, des
 sentiments ou des intérêts ne soit pas, chez elle, une force toujours
contestée et à chaque instant menacée.
    Ce n'est pas un moindre préjugé d'affirmer que la libre propagande
des idées doive conduire à l'étouffement des notions morales qui pré-
 sident à l'existence des sociétés. Ces notions morales ont, au con-
 traire, leur source et leur garantie de durée, dans l'acceptation volon-
 taire des esprits, dans les croyances et dans les mœurs. 11 en est ainsi,
 notamment des notions religieuses; la plus élevée de toutes, la notion
 catholique, reconnaît pour sa base d'autorité le consentement antique
 et permanent du genre humain, et l'histoire témoigne que la liberté de
 la foi et de l'Eglise a bien plus trouvé d'obstacles dans les pouvoirs
 despotiques et oppresseurs, que dans les erreurs momentanées des
 peuples libres.
     Pourquoi donc sommes-nous inquiets et troublés? Est-ce que le
 parti qui s'appelle de l'Ordre ne domine pas dans toutes les branches
  de l'autorité ? Il a la majorité parlementaire et dicte ses vues au pou-
  voir exécutif. Le parti opposé est courbé sous le genou qu'il lui tient
  sur la poitrine ; et, vis-à-vis de ceux qui ont contre lui la liberté de
  l'état de siège, la liberté des arrestations préventives, la liberté des
  conseils de guerre, il n'a plus même la liberté de la plainte. La Répu-
  blique est comme un jeune héritier remis entre les mains des collaté-
  raux, qui déjà s'écrient qu'il n'est pas né viable, afin de faire trouver