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             DU GÉNIE LITTÉRAIRE DE L ' E U R O P E .        495

nous sommes généralement arrêtés à la fin du dix-huitième
siècle, ne jetant sur le dix-neuvième qu'un coup-d'œil rapide
et incomplet. Et cependant combien d'illustrations ont mar-
qué cette époque et la distinguent encore en Italie, en An-
gleterre, en Allemagne comme en France ! Quelle impulsion
n'a pas donné surtout la grande révolution européenne dont
les péripéties terribles ont enfanté tant d'œuvres d'élite! C'est
donc à l'élude de ces œuvres que nous consacrerons chaque
semaine une séance, en commençant par Alfiéri et Byron
comparés à Schiller et à Gcelhe.
   Mais il est une autre objection qui me frappe et me pré-
occupe. En traçant ainsi isolément l'histoire de chaque lit-
térature, en signalant chaque grand écrivain, en analysant
chaque chef-d'œuvre, qu'ai-je fait de plus que vous offrir des
vues partielles, incohérentes peut-être ; des notes abruptes
et confuses d'un immense et lointain concert? L'harmonie
musicale résulte, vous le savez, de l'accord parfait de tous
les tons ; et de même le génie poétique ne peut s'ap-
précier, selon moi, dans sa diversité féconde et sa majes-
tueuse unité, qu'en comparant attentivement toutes ses phases
à travers les siècles, et ses manifestations les plus hautes
dans toutes les langues et dans tous les pays. Partout nous
retrouvons le même but, la même loi fondamentale et né-
cessaire : la peinture du monde visible et celle du monde in-
tellectuel. Partout nous voyons des images, des descriptions
et des emblèmes, partout aussi des récits, des discours et
des scènes dramatiques ; partout des tableaux de la nature
et des tableaux du cœur humain. Comment les grands poètes
de chaque siècle ont-ils traité ces points fondamentaux ?
Quel rapport ou quelle différence dans leur manière de pein-
dre un même objet, une même image, un même sentiment
avec les ressources diverses de leur langue, de leurs mœurs
et de leur génie? Quelles nuances distinguent chaque genre