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2t>8 riM TABLKAlr UF. MURILLO. siasme qui brille dans ses yeux, tout en lui révèle le héros, le législateur, l'ame supérieure. Ses cheveux flottent sur ses épaules, comme agités par le souffle d'en haut; l'inspiration éclaire son visage, mieux encore que le chaud rayon de soleil qui vient le dorer; les célèbres jets de lumière jaillissent de son front : c'est le prêtre des anciens temps, intermédiaire unique entre la divinité et le peuple ; c'est le prophète, dépo- sitaire de la puissance et des secrets de Dieu. Ce contraste est d'un effet sublime. Après avoir erré avec tristesse sur ces groupes sensuels et inintelligents, les yeux se reportent avec bonheur sur l'idéale figure de Moïse, toute rayonnante de sainteté. La sainteté, voilà l'étal le plus élevé dont l'ame soit sus ceptible; et, par suite, le but le plus noble que l'art puisse se proposer, c'est de reproduire dans ses œuvres l'incom- parable beauté dont elle empreint le visage humain. Aussi a-l-on vu pendant trois siècles, et voit-on encore de nos jours les artistes de toutes les nations rivaliser d'études, de zèle, de travail pour se surpasser dans celle sublime tâche. II semble que la palme soit restée aux peintres es- pagnols. Cette exaltation religieuse de l'Espagne, qui s'est portée quelquefois à des excès si étranges, si effroyables, a accompli des prodiges lorsqu'elle s'est combinée dans une tète bien faite avec l'esprit de mesure et le sentiment des réalités. Que ne doit-on pas lui pardonner pour avoir pro- duit, qu'on me passe un rapprochement qui n'a rien de pro- fane , l'héroïsme du Cid, les flammes mystiques de sainte Thérèse et le génie de Murillo ! Vraiment, monsieur, quand j'arrive à m'expliquer ainsi un tableau, il ne me reste plus guère de doute, de scrupule sur la légitimité de l'admiration qu'il m'inspire. Sans doute, celui à qui les procédés de l'art sont inconnus, ne peut apprécier que très ilaiblement l'habileté matérielle du gra-