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•27$ mr KOMAN-FEUILLKTON. tion des vices, des crimes et des misères de l'humanité ; où la vertu serait fade, nauséabonde; où les meurtres, les incestes, les adultères, les empoisonnements, le vol, sont les épices des plats qu'on y sert au public ; où les coups de poignard se donnent comme ailleurs les poignées de main;où l'intérêt qu'on y trouve est impatient,fiévreux, désordonné, maladif comme les événements horribles qu'on y re- trace ; où l'histoire n'entre que défigurée, grimaçante, et se con- formant moins à la vérité qu'aux dramatiques exigences du jour; où l'on barbouille de sales impostures la figure respectable de no- bles personnages, que l'équitable Clio nous avait appiis à entourer de nos respectueux souvenirs 1 Que doit-il rester de ces dévergondages littéraires :' Cela sans doute, le présent aura valu plus d'argent à leurs auteurs que l'ave- nir ne leur réservera de gloire, et leurs noms, si connus aujourd'hui, no passeront pas plus à la postérité que ceux de leurs héros. Mais ils auront existé riches, recherchés, et cela suffit au matérialisme de notre époque , qui vit à l'heure et se soucie peu du lende- main. Et toutefois, du haut de son importance, le romancier-feuilleto- niste protège tous les arts et favorise toutes les industries, sans en excepter la sienne. Voici à ce sujet une petite anecdote de la vérité de laquelle nos lecteurs pourront s'assurer, en parcourant eux-mê- mes les feuilletons du moment. M. A***, l'un des pourvoyeurs du rez-de-chaussée d'un journal à lu mode, fut sollicité par un bottier, de recommander à ses lecteurs sou magasin et sa marchandise ; sa demande à cet égard était ap- puyée du cadeau do trois paires de bottes vernies, afin que l'auteur put juger par lui-même de l'excellence des produits de l'ouvrier; M. A***, sans refuser la requête de celui-ci, lui fit entendre qu'il no pourrait agir pour lui que dans un intérêt collectif, soit en favo- risant aux mêmes conditions d'autres industries que celle de la chaussure; le bottier comprit l'auteur, et revint le lendemain es- corté d'un tailleur et d'une modiste qui, tout en se recommandant à la bienveillance de M. A***, prennent mesure d'un habit pour lui, cl d'un vêtement complet pour M mc son épouse. Le feuilletoniste leur promit son appui, les congédia avec urba