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258 UN TABLEAU Dl< MURILLO. Moïse et Aaron sont bien près l'un de l'autre : Murillo, non moins profond penseur que grand artiste, a trouvé entre eux et admirablement exprimé les différences les plus tranchées et les plus naturelles. Moïse prie, il adore, il bénit. Ce n'est pas l'étonnement qui se peint sur son visage auguste; c'est la reconnaissance et l'admiration; mais une reconnaissance calme, une admiration non mêlée de trouble. On voit qu'au milieu des plus rudes épreuves, sa sublime confiance ne l'a jamais abandonné ; on voit qu'il n'a pas douté un instant de la puissance et de la bonté de son Dieu; que ce prodige nouveau ne lui a rien appris, et que, dans la sphère divine où son ame habite, les plus grandes merveil- les n'ont plus rien qui puisse le surprendre. Aaron, au contraire, joint les mains et pousse un cri. Sa foi était moins vive, son étonnement est plus grand. Les yeux fixés sur l'eau miracu- leuse, il est plus occupé du prodige que du Dieu qui l'a opéré. — Autour d'eux plusieurs petites scènes parfaitement grou- pées font éclater les caractères les plus divers. Quelques hom- mes du peuple ont envahi les abords du rocher. Grossiers et égoïstes, ils boivent avec avidité, sans s'occuper de ce qui les entoure. Un d'eux, arrivé plus tard, a dû lutter et percer la foule pour atteindre le bord du ruisseau. Les muscles de son visage, encore contractés, attestent la violence de ses efforts. Penché vers la terre, il s'y cramponne d'une main, tandis que de Tautre il puise un peu d'eau ; on voit l'impatience frémir dans son bras alongé. Cependaut un dromadaire , attiré par l'odeur de l'eau, cherche h se frayer un passage à travers le groupe serré. Un jeune homme, qui occupe le premier plan a droite, se retourne et montre aux conducteurs de l'animal le danger que va courir la foule, s'ils ne parviennent à le retenir. Chose admirable ! quoiqu'on ne voie pas son visage, ce personnage est des plus vivants, des plus parlanls qui se puissent voir. Sa pose est si vraie , ses mains dont l'une tient