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ABBOTSFORD. 319 brillant Claverhouse, et le terrible Ihon Balfour de Burleigh ! Allons, grand enchanteur, faites mouvoir encore une fois vos personnages! Une dernière fois soufflez sur ces formes que vous avez jetées dans le monde et que le monde connaît si bien ! Dites le mot magique, ô maître ! Dites la parole de vie, vous qui aviez l'esprit créateur! Mais hélas! il ne faut pas demander la vie à qui ne l'a plus; au lieu de l'animation du récit, il faut se contenter de la lettre morte et passer tristement dans la bibliothèque voisine. C'est la plus vaste pièce du château. Là on ne trouve plus les insignes de chasse, les curiosités gothiques, les caprices sans fin de l'antiquaire; mais on voit un magnifique plafond en chêne sculpté dans le goût ancien, et, ce qui vaut mieux encore, une riche collection qu'on évalue à 20,000 volumes environ. II y a là , dit-on, des livres rares à faire mourir d'envie un bibliophile, et qui m'occupèrent peu. Mais, en revanche, je remarquai dans celte réunion un livre très commun, qu'on rencontre partout, un Molière, et je me rap- pelai que, lorsqu'il vint en France, Walter Scott se découvrit avec un respect de bon goût devant l'image de notre illustre auteur comique. Cela se conçoit de la part d'un écrivain qui mit tant et de la meilleure comédie dans ses œuvres! Je vis là aussi quelques-uns de nos chroniqueurs français, el, parmi les auteurs contemporains, les premiers ouvrages d'Au- gustin Thierry, témoignage d'estime, juste à toutes sortes de titres, et qui était bien dû à celui qui a garanti d'une manière décisive, et sur sa ferme parole d'historien, l'exacti- tude historique de Walter Scott. En quittant la bibliothèque, on entre dans une chambre attenante, qui n'a rien de remarquable, mais là est le vrai sanctuaire , là , sur cette simple petite table ont été com- posés ces délicieux récits qui tiennent le monde attentif et